Tous les samedis, deux banlieusardes s’incrustent dans les soirées jet set. La première flirte avec un petit bellâtre friqué, la seconde décroche un job de nounou de star. Du girly way of life dicté par Biba ou du racisme social à la sauce Chatiliez-Zone interdite, Tout ce qui brille choisit son camp au bout d’un quart d’heure, repeignant en rose tout ce qui ressemble de près ou de loin à un embryon d’injustice sociale. Pas un délit de sale gueule à l’horizon (très fort pour un film d’incruste) dans cette chronique ouvertement gentillette où le riche va se montrer, dans le pire des cas, un rien condescendant dans sa mansuétude à l’égard des pauvresses. Ces dernières se coltinent, au pire, deux-trois problèmes de transports en commun, partagent leurs pompes et leurs fringues, achetées dans la même boutique select que leurs copines richardes.

Tout ce qui brille pourrait d’ailleurs s’appeler « Pas si grave », voire « Tout devient possible », tant les barrières sociales ne consistent rapidement qu’en un clivage géographique, le choc culturel étant toujours très feutré, très doux, à chaque incursion chez les rupins. On peut même parler de drague polie, de fascination mutuelle, ponctuelle. Mais de cruauté, d’ironie, jamais ou presque. C’est à peine si l’on succombe au plaisir subtil de l’infiltration : les prolos louchent bien sur le coffre à bijoux et le dressing géant des bourgeois, mais ne leurs piquent rien. On retient chez leurs hôtes un mépris trop mou, trop amusé pour susciter la moindre explosion. Il faut voir d’ailleurs, combien les riches sont trop fugacement portraiturés pour constater qu’ils font simplement partie du décor, au même titre, qu’un petit four ou une flûte de Moet et Chandon. Unique star du film, Virginie Ledoyen n’a droit qu’à deux répliques et demie (sans un mot de trop, pendant qu’une love story riche-pauvre se déroule en parallèle à la manière d’un roman-photo sans bulle, où le clivage social n’est présumé ni coupable ni responsable.

Au moins cet accès positiviste a le mérite de rafraîchir la sociologie banlieusarde, vraie base géographique du film, ici dégraissée de ses racailles et de ses flics habituels. Le film se borne à ne rapporter qu’une ambiance villageoise colorée, animée par une série de personnages sympatoches (la famille, la prof de sport), striés de gimmicks bien sentis (l’aboyeur, au balcon, qui fustige tout ce qui passe). Seulement voilà, le buddy movie au féminin réclame moins une chronique qu’une intrigue, raison d’être du film bizarrement niée à chaque incruste dans les soirées, par un trac narratif carabiné (rien ne s’y passe, hormis des toast et des regards en coin). Résultat, au lieu de se gorger de lumière, Tout ce qui brille étiole ses ambitions de Rastignaquettes en jupons comme un cachet effervescent sur le déclin, condamné à agiter les mêmes ficelles pour rester en vie. Lesquelles consistent à prolonger la discussion girlie à coups de vannes racaillisantes. S’il y a de quoi garnir deux ou trois bandes annonces, un film reste encore à faire.