A la faveur d’un doublon magique (Anchorman, la légende de Ron Burgundy et Ricky Bobby, roi du circuit), le Ferrell-movie est devenu à lui tout seul un nouveau standard, infiniment aimable, de la comédie US d’aujourd’hui. Soyons honnêtes : ces nouvelles aventures, sportives comme Ricky Bobby, funky comme Anchorman, ne sont pas les plus réussies. Disons, pour être clair, que Semi-pro est un tout petit mieux que Les Rois du patin, qui lui nous avait clairement laissé sur notre faim en dépit de son audace queer. A quoi tient, alors, notre relative indulgence devant ce film, certes rigolo, mais un peu feignant au regard du génie comique de Ferrell ? Probablement à la joie de voir ici réparer une injustice : contrairement aux trois autres, condamnés à des sorties techniques voire à pas de sortie du tout pour Ricky Bobby (le meilleur, de loin), celui-ci s’invite, enfin, dans nos multiplexes. Et ce plaisir se double d’une autre satisfaction : celle de voir se creuser, même en mode mineur, la ligne d’une belle oeuvre comique, cohérente et généreuse.

Tignasse afro, rouflaquettes et col moumoute, Ferrell joue Jackie Moon, auteur d’un tube disco (Love me sexy, tout un programme) reconverti, au mitan des 70’s, en proprio et entraîneur d’une équipe de basket miteuse qu’il va essayer d’amener jusqu’en NBA. Nouvelle variation colorée sur l’entertainment et le rêve américain, Semi-pro continue l’espèce d’odyssée minuscule entreprise par Ferrell sur le terrain de la culture populaire américaine dès les années Saturday Night Live. Semi-pro s’installe sur le même équilibre que les précédents, entre satire gentille de l’Amérique (à travers le portrait de ses enfants narcissiques et rompus à l’entertainment) et feel-good movie coloré. Soit la formule qui éclatait dans la paire Anchorman / Ricky Bobby, coécrit par Ferrell avec Adam McKay et produit par Apatow. Que McKay ne soit pas aux commandes, ni Ferrell derrière le scénario n’est sans doute pas étranger à la relative baisse de régime qui se fait jour ici. Hormis quelques belles idées (toujours sur le versant de l’apprentissage et du corps tourneboulé : ici, Ferrell doit apprendre à vomir pour quitter l’enfance), manque une étoffe aussi soigneusement tramée que dans les deux autres. Affaire de casting, aussi, probablement : font défaut au film, tout entier dévolu au show Ferrell, des seconds rôles aussi forts que ceux de Paul Rudd / Steve Carrel (Anchorman) ou John C. Reilly (Ricky Bobby). Prenons donc ce Semi-pro pour ce qu’il est, un coupe faim acidulé et sympa comme tout, avant le véritable festin, annoncé lui pour septembre avec Step brothers, le nouveau Ferrell / Reilly / McKay / Apatow.