En ce dernier week-end d’été, pour la mère de famille, c’est l’heure des bocaux à préparer pour l’hiver à venir. L’heure aussi où Françoise, amoureuse, s’essaye à de fougueux play-back devant son petit frère Julien. Dans l’appentis derrière la maison, Karim a troqué ses rêves de théâtres pour du travail au noir. Dans quelques heures, c’est l’inauguration des nouveaux locaux de la conserverie, où le père travaille. Personne n’attend Sonia, qui a pourtant choisi ce matin-là pour revenir. Les protagonistes de cette histoire sont des êtres meurtris, parfois même brisés. Mais attention, un enfant regarde : Julien (Martin Mihelich) observe tout ce petit monde douloureux et alterne entre attirance et répulsion pour cet univers des adultes. Julien a une grande soeur, Sonia (remarquable Mireille Roussel, que l’on peut voir aussi dans La Nouvelle Eve de Catherine Corsini). Cette dernière, et c’est le début du film, revient avec mari et enfant sur les lieux de sa jeunesse, ceux aussi d’une immense blessure ; dans le cimetière du village un ange s’est arrêté, cet ange l’attend. Et puis il y a le reste de la famille : Françoise (Laetitia Legris), la jeune soeur de Sonia, qui traverse l’ adolescence ; enfin les parents, et tout d’abord une mère, elle aussi blessée (Lily Boulogne) qui n’a pas oublié la cicatrice faite à sa fille. Face à cette femme, un père (Daniel Isoppo) qui travaille à la conserverie du village et qui a pour patron Bernard (Pascal Cervo) l’ex-fiancé de Sonia, celui par qui jadis le malheur est arrivé dans cette famille. Bernard, qui lui tente de refaire sa vie. Le père qui boit, revient souvent à la maison dans un piteux état. Il n’en est pas moins paternel et chaleureux. On le voit dans une belle séquence donner rapidement dans le dos de l’autorité maternelle une cigarette interdite à son jeune fils. Fraternel aussi, il héberge Karim (Zakariya Gouram) un jeune homme sans papiers qui galère et se planque dans la cabane au fond du jardin familial. En échange, Karim travaille et rend de petits services. C’est ce père qui prononce la dernière phrase du film, drôle et loufoque, comme lui.

Plus qu’ hier, moins que demain est une belle radioscopie en 24 images seconde de cet intime que les êtres dissimulent et protègent du regard des autres ; ce premier long métrage exprime à sa façon les propos d’ Octave dans La Règle du jeu de Renoir : « Que veux-tu, le drame dans ce monde, c’est que tout le monde a ses raisons ! ». En ce mercredi 3 février 1999, espérons qu’Astérix n’ait pas été le seul à se déplacer en Gaule « cinématographique ». Allez donc découvrir ce village dans lequel on livre une autre bataille, celle de l’âme et de ses tourments, celle de la vie.