C’est sans doute un des films Ghibli les plus méconnus, avec Omohide Poroporo de Takahata. Et pour cause, le rapprochement n’est pas innocent, Mimi o sumaseba est, tout comme Omohide, une chronique lente et quasi neo-réaliste de la vie quotidienne. Pas de climax épique à la Nausicaä, très peu de féerie régressive à la Totoro, mais toujours ce soin apporté aux paysages qu’ils soient champêtres ou, comme c’est le cas ici, suburbains. Réalisé par Yoshifumi Kondo, assistant de Miyazaki qui devait prendre sa place après la retraite du sensei (le sort en a décidé autrement puisque Kondo est décédé d’un anévrisme en 1998), Mimi o a cette saveur particulière qui fait le charme des films estampillés Ghibli. La personnalité du réalisateur a d’ailleurs été littéralement écrasée par celles des deux grands pontes du studio. On retrouve le penchant de Takahata pour les chroniques quotidiennes et presque documentaires d’un Japon suranné. Mais surtout, on sent l’ombre de Miyazaki, qui a lui-même adapté le manga d’Aoi Hiiragi, mis en place le storyboard et réalisé les rares scènes oniriques du film. Un omniprésence qui transpire par le chara-design, immédiatement reconnaissable et l’attitude volontariste de l’héroïne Shizuku, prototype de la fillette courageuse miyazakienne depuis Nausicaä. Et puis il y a ce talent à faire jaillir l’émotion d’un rien, talent un peu mis en berne dans le récent Chihiro : une vieille scie country interprétée par Olivia Newton-John, la beauté des paysages de banlieue résidentielle, le charme désuet d’une vieille boutique d’antiquités. Ces petits riens du tout transcendent un scénario lymphatique et font de ce Mimi o sumaseba un des plus beaux films Ghibli malgré l’effacement du réalisateur face au monstre sacré Miyazaki.

Rien à redire sur la qualité de ce DVD nippon. Ippai est un des rares éditeurs japonais à proposer des sous-titres -il faut dire que Miyazaki s’exporte plutôt bien-, parfois même français. Il faudra se contenter ici des ST anglais, impeccables, contrairement à ceux de Totoro qui se contentaient de reprendre tel quel le script de la version US. Un achat indispensable pour les anime-fans capables de supporter la lenteur pesante mais magnifique du film.