Simple vaguelette en lieu et place du tsunami cinématographique espéré quelques années plus tôt, le renouveau du cinéma argentin. Les apôtres d’hier sont devenus de banales fioritures festivalières, ni grands noms ni espoirs : en 2006, Adrian Caetano est reparti de Cannes dans l’indifférence absolue avec Buenos Aires 1977 (ce qui n’en demeure pas moins injuste), Carlos Sorin (Bombon el perro) fatigue un peu brin avec ses fables voisines de la constellation de la lobotomie heureuse. Quant à Fabian Bielinsky (Les Neuf reines, remake à Hollywood et tout le tralala), la grande faucheuse l’a brutalement emporté après El aura, thriller tarabiscoté des plus foirés.

De la bande, reste Diego Lerman, sans nouvelle depuis Tan de repente, road movie applaudi à tout rompre en 2002. Mientras tanto n’incite pas franchement à le revoir tant cette nouvelle livraison est des plus convenues. On prendra donc une nouvelle louche de mélo social éclaté avec gros barbu colérique parce que tristounet, patron minable bouffé sa mère et frêle ménagère qui rêve d’un nouveau départ. Ce n’est pas que Diego Lerman soit plus limité qu’un autre, mais face à un genre aussi codifié, impossible d’en sortir indemne. Un vrai rouleau compresseur à idées ce truc du destin croisé : rien qui ne paraisse prémâché, vidé de sa substance, condamné à la performance toc. Rien qui n’échappe à la petite musique symbolique, au néant existentiel fourre-tout.

Plus que d’indulgence, il faudrait un oeil neuf, lavé d’une décennie et demie de comédies dramatiques exotiques pour tâter l’humanisme de Mientras tanto. On le répète, Lerman n’y peut rien, fourvoyé dès le départ pour cette envie délirante (et casse-bonbons) de se mettre à l’esperanto métaphorique. La tentation doit être grande en effet car la mégalomanie du film choral n’est pas des plus clinquantes : les ellipses y passent automatiquement pour raffinées, la sociologie est simple et directe (plaisir de reconnaître les autres et soi-même : spéciale dédicace aux prolos qui nettoient le caca des riches, aux angoissé(e)s, aux femmes battues, aux mecs plaqués, etc.), et le surréalisme digéré ad hoc (le monde marche sur la tête, that’s life hermano). Pas sur que l’humilité souffreteuse sublime un tel programme.