Jouxtant les faux trentenaires (Klapisch, Harel) et trublions télé (Youn et Coe, Robins des Bois, Dujardin), une nouvelle ramification pousse sur l’éternel chantier de la comédie française, entre humour BD et délires djeuns. Qui la compose ? Coté acteurs, des starlettes à stature floue, en work in progress continu, dont Guillaume Canet est l’incontestable petit roi. Coté mise en scène, des débutants désinvoltes (tous sont d’abord acteurs) aux écueils de micro-wonderboys, pour qui le cinéma ne dépasse pas le stade du gros joujou régressif et méchant. Mais Ma vie en l’air va chercher un peu plus haut : moins de frime et de show-biz, plus de métier et d’humilité. Outre le fait que Rémi Bezançon soit réellement cinéaste de formation (important pour un faiseur), le retour de Vincent Elbaz, après cinq années quasi vierges s’avère un choix limite fascinant.

Le grand dadais Klapishien incarne un nouveau trentenaire (casé professionnellement, célibataire, et nostalgique de son enfance dorée), sorte de Bridget Jones au masculin que la franchouillardise -et l’interprétation Elbazienne, toujours sur la corde d’une imbécillité à peine esquissée, vire pas mal Jean-Claude Duss. Bezançon lui bétonne un univers, une névrose fourre-tout (la peur de l’avion) servant autant à métaphoriser la peur d’une génération à prendre son envol qu’à assembler le scénario et distiller un humour de farce et attrapes. Presque trop facile, d’autant que le film s’en tient souvent à une exposition apathique qui voudrait bien se suffire à elle-même. Tout-narratif (la voix off omniprésente) et génie du néant dramatique, pas étonnant que la meilleure scène soit un hilarant plan-séquence d’une journée de glande totale.

Mais il faut bien reconnaître que cette modernité piquée à Hollywood foire, comme elle foirait pour les mêmes raisons que Narco. La faute à ce manque criant de virtuosité, qui confère au film un petit côté frère Coen du pauvre, toujours en sur-régime mais jamais récompensé par cette incapacité à transformer le climax en intrigue. Ce qui sauve Ma vie en l’air reste alors son squelette franchouillard, inconscient professionnel que Rémi Bezançon ne réprime toujours pas et manie même assez bien. Personnages sociologiques, acteurs à l’ancienne, quasi-téléfilmique (Didier Bezace frère cinéma de Bernard Le Coq, au jeu naturaliste légèrement bouffonné franchement irrésistible), comiques de situations, le gag n’est ici vivace qu’en temps réel, jamais aussi bon que lorsqu’il s’incarne dans une trivialité de vaudeville post-soixante-huitard.