A la fin de leurs vacances en Malaisie, deux étudiants américains, Sheriff (Vince Vaughn) et Tony (David Conrad), laissent à leur compagnon de voyage Lewis (Joaquin Phoenix) un petit souvenir qu’ils peuvent difficilement ramener au pays : leur provision de haschich. Deux ans plus tard, l’avocat de Lewis les contacte ; arrêté juste après leur départ en possession d’une trop grande quantité de drogue, Lewis est condamné à mort par la justice. Pour le sauver, Sheriff et Tony doivent se présenter aux autorités malaises et déclarer qu’une partie de la drogue leur appartenait. Leur geste sauve Lewis mais ils doivent alors purger une peine de plusieurs années de prison.

Ce cas de conscience n’est pas sans nous rappeler celui qui agitait Patrick Bruel et François Cluzet en 1989 dans Force majeure, Loin du paradis est en effet le remake du film de Pierre Jolivet. La réflexion morale de Pierre Jolivet sur le sens du sacrifice, la notion d’héroïsme, aurait pu, en passant de l’autre côté de l’Atlantique, se transformer en lourde démonstration manichéenne. Or il n’en est rien, on est agréablement surpris par ce film nuancé. Point de chantage au spectateur du genre : « et vous qu’est-ce que vous feriez si vous aviez la vie d’un homme entre vos mains ? », point de longs discours sur l’héroïsme, grande valeur éternelle de l’Amérique. Servi par de bons interprètes, une photographie particulièrement soignée, ce remake, certes pas nécessaire, se révèle tout à fait digne de son modèle.

Joseph Ruben aurait dû s’en contenter, mais la copie ne lui suffisait pas. Le film de Jolivet s’arrêtait au moment où les deux personnages avaient effectué leur choix, le reste demeurait hors-champ. Ruben prolonge inutilement le sien en faisant retourner ses personnages en Malaisie. Les scènes de procès, les images de geôles malaises particulièrement insalubres, alourdissent alors singulièrement son propos. Le remake honnête s’efface, seuls le voyeurisme et les bons sentiments demeurent. Les velléités créatrices de Joseph Ruben lui ont fait oublier que les meilleurs faussaires de tableaux ne sont pas pour autant de grands artistes.