Dans une petite gare routière d’un village de Cuba, des dizaines de personnes attendent depuis des heures, des jours, leur bus. A bout de patience les « passagers » décident d’agir ; ils tentent de réparer le vieux car de la compagnie et finissent même par rénover de fond en comble la station pour créer une sorte de communauté idyllique. Si la métaphore est on ne peut plus claire -c’est aux Cubains de prendre leur destin en main et de tenter de reconstruire leur pays à partir des cendres du régime communiste qui n’en finit pas d’agoniser-, Liste d’attente n’est pas pour autant un lourd film à message. Plus qu’un pamphlet, Juan Carlos Tabio réalise un conte drolatique sur un pays où les files d’attente sont devenues une partie intégrante de la culture. Ainsi, par exemple, lorsque miraculeusement un bus finit par s’arrêter mais qu’il ne dispose que d’une seule place, une longue discussion débute : Qui doit monter ? Le premier arrivé, la vieille dame ou l’aveugle qui est théoriquement prioritaire mais ne dispose pas de carte de handicapé ? Les dysfonctionnements d’un pays, les lourdeurs administratives du système communiste ainsi que l’absurdité des situations qu’il engendre sont certes stigmatisées mais toujours sur le mode de la comédie. Malgré tout Liste d’attente est empreint d’une certaine maladresse -les interventions des personnages sont parfois sur-signifiantes et le groupe reflète de manière un peu trop visible les divers courants de la société cubaine : attentisme, fidélité au pouvoir en place, fuite vers l’étranger. De surcroît, la mise en scène de Juan Carlos Tabio peine à se renouveler dans ce quasi-huis clos, et le film, un peu trop statique, n’échappe pas à une certaine théâtralité. Ce que l’on retient alors, c’est le portrait attachant d’une culture de la débrouille, d’un pays qui a élevé le système D au rang de valeur suprême.