Après Blueberry et Open range, Les Disparues confirment que le western opère un sympathique retour par la petite porte. Plus mûr que le film de Kounen, moins attachant que celui de Costner, ce nouvel opus trouve rapidement ses marques, sans bouleverser ni fâcher. Ron Howard voit simple. En artisan métronomique d’Hollywood, faire un bon film, ou tout bêtement un western, lui suffit. Pas de prise de tête, donc, plutôt un immense plaisir de filmer les grands espaces, la cavalerie, les indiens et autres figures imposées.

Le scénario s’y prête, une pure variation sur La Prisonnière du Désert. Soit du John Ford deuxième période, souple passage entre facture à l’ancienne et remise en question du mythe qu’on retrouve jusqu’à Eastwood et… Open range. L’histoire donc : une guérisseuse, Maggie (Blanchett) qui voit sa fille aînée enlevée par des indiens au moment où son père (Tommy Lee Jones), parti dès son enfance s’imprégner de culture apache, revient au bercail. En dépit de leurs différents, ils vont suivre la trace des kidnappeurs. Sur leur chemin, des révélations, un cours de chamanisme, des rencontres, des confidences, des affrontements. Pas de préférence pour un genre ou un autre, pas d’obsession. Fascinante, cette fusion sans bavure, qui au lieu de limiter le film, le libère plutôt. Car si Ron Howard a beau s’emballer pour un rien, il fait preuve d’une digestion parfaite de l’histoire du western, d’une vision incroyablement sentie du genre.

Maîtrise ou carence, on s’en fout finalement un peu et on regarde le film comme le voit Howard lui-même, un objet de plaisir, un prototype parfait d’une méthode qui porte enfin ses fruits. L’idéal familial gnangnan, les rôles de composition pour les stars, l’eldorado des oscars, le prestige de s’atteler à un genre devenu sérieux, pour adultes, tout cela trouve une cohérence, une épaisseur, un crédit. Le film se divise en autant de défis à bien filmer : un arrachage de dents, des paysages (le Nouveau Mexique magistralement éclairé par Salvatore Totino), et surtout des entrées en matière dont celle de l’excellent Tommy Lee Jones, jubilatoire par son esthétisme (prairie enneigée en grand angle) et son atmosphère mythique, muette. Pas le film du siècle, mais le chef-d’oeuvre de Ron Howard.