Il y a quelque chose de tristounet à voir l’un de nos plus chers héros d’enfance voisiner dangereusement aujourd’hui avec les gloumoutes illuminés de notre pourtant non moins chère CLH (cf. chronique de L’Histoire de Richard O. de Damien Odoul). Après s’être lancé dans une carrière de tragédien des prés (Se Souvenir des belles choses et autres nanars au lait de chèvre), Bernard Campan se prend pour Jean-Marc Barr – étape ultime de sa transmutation ? – et réalise son premier mélo psychologique. La micro-surprise, c’est que le film plane, par sa sobriété, sa modestie et sa pudeur, au dessus de ceux des copains Zabou Breitman, Marc Esposito et Cie. Sans atteindre, on s’en doute, des sommets cinétiques, le film décrit le parcours d’un couple miné par le doute. Viard n’a pas l’air net, son oeil est torve et plusieurs fois Campan la surprend en compagnie d’un homme étrange. Et des inserts de témoins, qu’on croirait sortis d’un documentaire, rythment le film… Bizarre, bizarre. Ce mystère – que cache-t-elle ? – sera balayé par une ultime révélation. Surprise : celle-ci donne in extremis à cette humble zèderie une touche de justesse et de gravité bien senties.

S’il ne sombrait avec une telle complaisance dans un milieu à des années lumières de son génie burlesque, Campan ne nous apitoierait point. Mais le côté parodie involontaire (de celles que les Inconnus et leur faux ciné-club réalisaient justement du temps de leur splendeur) pèse lourd. Et lorsque le nouveau parvenu du cinéma français se prend pour Hitchcock (remember Psychose) en faisant transmettre à la fin des projections de presse des petits messages demandant poliment de ne pas révéler la face cachée de Viard dans le film, des hormones de gremlins nous montent à la tête. Pas question cependant d’offenser celui qui reste, avec Bourdon (et suite à la has-beenation terminale de Legitimus), le dernier espoir de voir un jour un nouveau Pari, chef-d’oeuvre des chefs-d’oeuvre, sortir sur nos écrans. A moins que Campan persiste dans le béta-nanar bouleversifiant.