Cannes 2000, souvenez-vous : gros triomphe pour le cinéma iranien, qui voit deux anciens assistants de Kiarostami se partager la caméra d’or – Hassan Yektapanah pour Djomeh et Bahman Ghobadi pour Un Temps pour l’ivresse des chevaux. Si le premier nommé a plus ou moins disparu de la circulation depuis (en tout cas son film suivant, réalisé en 2004, n’a pas été vu), Ghobadi a poursuivi sa moisson de récompenses aux quatre coins de la planète, grâce aux Chants du pays de ma mère et Les Tortues volent aussi. Bien. Mais le mini engouement suscité à l’époque par le premier long du cinéaste kurde n’a pas éteint le souvenir d’un film chichiteux, usant et abusant de plans-qui-tuent, de symboles lourdaud, d’un certain calibrage folklorique et tape à l’oeil. Rebelote avec Half moon.

Half moon est l’un des projets financés par le New Crowned Hope, mis en place sous la houlette Peter Sellars pour le 250e anniversaire de la naissance de Mozart, et qui constitue une série d’oeuvres inédites dans plusieurs disciplines, où les artistes ne sont pas tenus d’évoquer directement le compositeur de « Ah vous dirais-je maman ». De cette initiative sont nés sept films, dont la plupart sont déjà sortis : Syndromes and a century, Hamaca Paraguaya, I don’t want to sleep alone et Daratt. Ne restent à découvrir que Sekalli le meokgo du Sud-Africain Teboho Mahlatsi, puisque le très exotico-folklorique Opéra Jawa de l’Indonésien Garin Nugroho a déjà tourné dans pas mal de festivals.

Half moon n’invite qu’à réitérer un même constat sur le cinéma iranien, dont l’histoire est riche et longue : s’il a connu un impressionnant renouveau depuis la fin des années 80, il reste, en dehors de Kiarostami et Panahi, incapable de s’affranchir de sa mauvaise tendance à la poésie wannabe, à l’imagerie forcée, au folklore mal dégrossi, à l’onirisme simplet. Half moon est un road-movie qui trimballe une troupe de musiciens kurdes voulant passer du Kurdistan iranien au Kurdistan irakien (Saddam vient d’être chassé) pour y donner un concert. Ghobadi se répand en décorum et saynètes à l’incongruité programmatique, à quoi s’ajoute une part fantastique aussi peu spontanée que le reste. Le film se traîne en longueur, trop fier de ses trouvailles, qui clignotent partout comme les loupiotes d’une guirlande.