Une femme flic, traumatisée par la mort de son enfant un 29 février, doit enquêter sur l’étrange suicide d’une femme retrouvée pendue au milieu des bois. Bientôt, ses propres angoisses interfèrent avec ses investigations sous forme d’hallucinations ou de cauchemars morbides. Le film de Guillaume Nicloux prétend fonctionner selon la logique du rêve, sur un canevas quasi lynchien (visions, cauchemars et réalité s’encastrent dans un tissu flottant), la mise en scène cherchant à enduire le réel d’un trouble poisseux et refoulé. Si l’ambition est louable, elle en vient vite à étouffer tout ce que le film peut avoir de singulier. Vouloir donner chair à une obsession souterraine qui vient gratter et salir la trame policière devient le prétexte à un étalage de séquences d’outre-tombe sans véritable épaisseur -rêves et visions se répétant à l’infini comme un épuisant et interminable train fantôme.

Recoller les morceaux d’un puzzle, programme à redire jusqu’à saturation, sous forme explicite (Balasko s’absorbe dans les puzzles, son sport favori) ou implicite : à chaque image, fragment de rêve, trouver une place dans le film, lequel débute par une série de travellings dans des lieux déserts éparpillés plus tard dans le récit, à la manière de petites pièces de puzzle mises de côté en attendant de trouver leur réelle destination. Sans respiration, le film se contente de colmater laborieusement les brèches par où autre chose qu’une ambiance délétère pourrait s’infiltrer, quand bien même son sujet est au contraire la porosité entre le réel et le fantasme (fût-il morbide) et les fissures de son personnage. De ces mouvements de troupe (récit perméable au mystère contre rigidité du parti pris semi fantastique) ne restent, à l’image que des lambeaux d’un réalisme de l’imaginaire, sombre et étriqué. Quant à Josiane Balasko, jamais elle ne sort de la posture du comique à contre-emploi, qui nous montre une-autre-facette-de-son-talent à travers un rôle sombre -comme si ce n’était pas sérieux de faire des comédies. Dès lors qu’un comédien joue à « prendre des risques » (ici, Balasko dans un jeu rentré, peu loquace, pimenté de quelques scènes dénudées), très vite on tombe dans la performance et quelque chose de sa spontanéité se perd irrémédiablement.