Bandits d’amour s’ouvre sur deux très beaux plans : Hélène (Florence Loiret), fragile et tendue, et Paul (Vincent Ozanon), le regard brûlant et déterminé. Ils se regardent, se parlent à demi-mots, s’embrassent. Ils sont dans un café, dans une petite ville du Nord, sur le point de braquer l’agence bancaire dont Paul est client. Paul et Hélène s’enfuient vers le sud après le braquage, dilapident l’argent, se disputent. Tandis qu’Hélène se laisse courtiser par Fabien, un quadragénaire riche et seul, Paul rumine sa révolte, refusant tous les compromis, persistant dans son désir d’être et de rester un bandit.

Malheureusement, le suspens et la sensualité de la première scène ne seront pas vraiment tenus par la suite. Pierre Le Bret (longtemps producteur et distributeur de films) a tourné son film sous l’influence des classiques américains qui ont magnifié l’amour en fuite : Gun crazy de J.H. Lewis ou Les Amants de la nuit de Nicholas Ray, grands modèles difficiles à mettre à la sauce française. Le décor de l’histoire de Paul et Hélène est la France moche, peuplée d’êtres décalés et de péquenauds au grand cœur, que le réalisateur s’avère impuissant à filmer. Un laisser-aller formel -une image digne des pubs pour la brasserie ou l’opticien du quartier diffusées en début de séance- cantonne le film dans une esthétique craignos, qui n’a même pas l’alibi du réalisme. Une B.O. atroce achève de ringardiser l’odyssée de ces deux amants, qui finalement ne propose aucune idée originale ou même personnelle.

La révolte de Paul et Hélène n’a aucune teneur existentielle ou politique, et n’a pas grand sens pour le cinéma. Après le demi-succès de Roberto Succo de Cédric Khan, le film criminel à la française a décidément du mal à se renouveler, prisonnier d’une approche vaguement sociologique qui ne fait que dissimuler le creux du discours. Bandits d’amour a pour principal atout la présence lumineuse et bouleversante de Florence Loiret. Jeune actrice découverte par Zonca (Seule) avant de confirmer chez Claire Denis (Trouble every day). Sa sensibilité et son talent éclatent ici à chaque scène.