Jours de miel. Un titre sirupeux pour un roman qui trouve toujours à tourner le sérieux en dérision, à se nourrir de ses absurdités, à collectionner les personnages en verve. Eshkol Nevo a une manière d’habiter le microcosme de son roman qui rend le monde facile. Parce que plus léger, parce que sans amertume, parce que vivant et avec allégresse. Jours de miel est un roman jubilatoire, même dans ses instants de tragique.

Rien n’est laissé au hasard. Le lieu : la ville des Justes, quelque part en Galilée. Une petite ville entourée de tombeaux sacrés, comme partout dans le désert, générant une « industrie des Justes » qui déverse ses tombereaux de pèlerins. Le maire Abraham Danino, quatre doigts de la main enfoncés dans sa poche de pantalon, à toucher « sans doute pas presque, ses testicules », malheureux en ménage, rêvant d’une fraîche immigrée russe qui lui tomberait dans les bras. Moché Ben Tsouk, « kibboutznik au cœur brisé », qui dessine des cartes et rêve à Ayélet, son ancien amour dont il sent partout le parfum. Ayélet, celle qui est partie puis revenue. Anton et Katia, débarqués de Russie dans un car pour immigrés du troisième âge et relégués au quartier « Source de fierté », renommé pour l’occasion « Sibérie ». Noam-Naïm et ses jumelles Nikon, pour observer les oiseaux. Et puis la base-secrète-connue-de-tous, Daniel le petit-fils, les lubies des uns et des autres, et la grande affaire : la construction d’un bain rituel ou mikvé, hommage à une épouse décédée, sur les fonds d’un généreux donateur.

Tout ceci mis ensemble, agité, reposé, forme un assemblage drolatique, où les problèmes d’érection des uns côtoient les observations ornithologiques des autres, où les amours adolescentes s’estompent dans des voyages au long cours, où les campagnes électorales se nourrissent des superstitions locales. De là à dévoyer proprement l’usage du mikvé finalement érigé en pleine Sibérie pour un public de joueurs d’échecs, il n’y a qu’un pas. Nevo le franchit avec une allégresse rafraîchissante, prêt à offrir à qui voudra ses jours de miels, peu importent les conséquences.

Traduit de l’hébreu par Jean-Luc Allouche.

2 COMMENTAIRES

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