Dans la foulée des récents remakes de classiques de l’horreur des seventies, Amityville advient comme un produit de pure logique. Assurément un classique, le film de Stuart Rosenberg ne brillait pas par son originalité mais devait à une savante technique d’artisan une relative beauté, une capacité surtout à provoquer l’effroi sans forcer. On sait pourtant à quel point le genre « maison hantée / maison maudite » demeure un genre fertile en forçages et effets de manche en série. C’est d’ailleurs cela, et rien d’autre, que rappellera au plus étourdis Amytiville 2005 : grâce aux potentialités offertes par le numérique, rien de plus facile aujourd’hui que de jouer avec les apparitions et autres phénomènes de dérèglement domestique. Rien de plus difficile, en revanche, que d’en revenir au seul problème qui nous intéresse vraiment ici : la peur.

Impossible donc, à la vision de ce gros loukoum fondu au cagnard des premières journées d’été (début d’été d’ailleurs bien pourri puisqu’il sera suivi de Cursed, annoncé comme pire encore), de ressentir le moindre frisson. La multiplication des effets d’étrangeté par le recours à de vieilles ficelles reliftées ne parvient que rarement à tirer le spectateur de sa léthargie : ici un bibelot qui tombe d’une étagère, là une voix qui s’élève de la cave en pleine nuit, là-bas un père dont le regard se voile d’une noirceur affreuse. Comme ça ne suffit visiblement pas, l’anonyme Andrew Douglas, suant à grosses gouttes, en rajoute une couche : au cours d’une après-midi champêtre, le père invente un jeu délirant dont le but est d’éviter à un de ses fils de se faire trancher en deux à gros coups de hache. L’air de fou psychopathe de Ryan Reynolds, digne d’un cartoon, provoque les premiers rires dans la salle. C’est mort : le film n’a plus d’autre choix alors que de courir vers sa fin en un sprint essoufflé contre le ridicule.

Dommage, car cet Amityville, sans ces effets grotesques, demeure plutôt élégant : les cadrages imposent une belle tension entre naturalisme et expressionnisme (demeure à la Psychose toujours aussi inquiétante et magnifique), la fixité et l’effarement l’emportent sur les traditionnels effets d’esbroufe MTV. Mais la psychologie carnavalesque et la vulgarité des artifices numériques plongent le film en des profondeurs que seules quelques productions Dark Castle (13 fantômes, Gothika) ont atteint ces dernières années. Et la firme de Silver et Zemeckis a au moins pour elle de s’être rattrapée avec le magnifique La Maison de cire. Pas sûr qu’un remake d’une des nombreuses suites d’Amityville en fera de même.