Qui l’eût cru ? Le trip hop est un repère de savants fous. Après le Docteur Mabuse Massive Attack et sa soul injectée de cold-wave hypnotique, revoilà les docteurs Moreau -tendance Marlon Brando tartiné de brandade, taré mais sympa- de Thievery Corporation qui n’hésitent pas à faire subir à leur musique d’improbables manipulations génétiques, tordues mais généreuses. Forts d’un premier opus remarqué (Sounds from the thievery hi-fi), nos bidouilleurs nous reviennent avec un mini-album réservé au marché français. Plutôt gentil de leur part. D’autant que cette nouvelle collection de titres s’articule autour d’un single éponyme franchement époustouflant, le torride Lebanese blonde, véritable manifeste trip hop, loungecore et orientalisant, de quoi transformer un cocktail mondain en boîte à partouze. Ils sont tellement fiers de leur composition, les garçons de Thievery, qu’ils n’hésitent pas à nous la refourguer trois fois : une version traduite en français -quelle idée saugrenue, d’autant que la malheureuse chanteuse ne parvient pas à aligner deux mots compréhensibles- et une version instrumentale -aucun intérêt. Sérieusement, trois fois le même morceau même pas remixé, sur une galette de huit pistes, on est plus proche du maxi-single que du mini-album… On ne va pas se plaindre, mais faudrait tout de même voir à ne pas nous faire prendre des vessies pour des lanternes…
Ceci étant dit, la plupart des autres morceaux n’ont pas grand chose à se reprocher, brassant à peu près tout ce qui peut se faire en music black injectée d’une bonne dose de sonorités asiates, lorgnant parfois même vers le funk pur jus (Coming from the top, très ethno-groovy). On retiendra du lot surtout le dub tripant One, fleuri de sitars déliquescents, idéal pour accompagner vos séances LSD, ou Halfway around the world, bossanova easy-leastening. En clair, Lebanese blonde est un petit objet indéfinissable qui a des forts relents promotionnels mais qui confirme tout le bien qu’on puisse penser de Thievery Corporation.