C’est avec plaisir qu’on retrouve Salaryman, alias Rose Marshack et sa bande de Poster Children déguisés, pour ce second album, avec encore à l’esprit les petits bonheurs bien carrés dispensés par le premier, sorti il y a maintenant deux ans. On avait aussi carrément adoré le remix de Voids + superclusters, sorti quelques mois après. Karoshi -qui signifie « mort par excès de travail » en japonais- débute en trombe avec Strong holder : claviers à bloc, ligne de basse vertigineuse, batterie électronique énorme qui ne craint pas l’omniprésence. Salaryman offre un son « phat », puissant, auquel on ne peut échapper. et maintient la présence rock, du moins sa rage et son côté organique, en continuant à n’utiliser les samples qu’avec la plus grande parcimonie. Certains morceaux ont tout pour devenir des hits, comme Monterey days/Malibu nights, et font la pige à pas mal de petits débrouillards de l’électronique, question groove nucléaire.

Bien sûr, les sonorités dispensées par les quatre de Salaryman restent « froides » dans l’ensemble, mais il y a longtemps que l’amateur de musique n’a plus peur du froid. Et pour ceux qui ne pourraient vraiment pas s’y faire, il y a des titres du style Graze the umbra -premier single extrait de l’album- à faire groover une vache. On imagine très bien ça comme la musique d’un cours d’aérobic de Véronique et Davina dans une société composée de robots. Et c’est un compliment.
My dog has fleas n’est pas mal non plus dans le genre, avec ses sortes de scratches synthétiques qui pourraient très bien être des aboiements enchantillonnés. Craters of the national moon serait une tentative d’easy listening lunaire cynernétique. The Companion, avec ses boucles de harpe, est sans aucun doute l’un des titres les plus charmants et les plus convaincants. Et un peu partout sur le disque, le pitch est à l’honneur, pratique ancestrale des utilisateurs de Korg et autres claviers analogiques, mais au combien efficace.

Au final, sans rien comporter d’humain ou presque dans sa conception, si ce n’est quelques bribes de voix dispatchées sur certains titres -et bien sûr quatre personnes s’affairant derrière leurs machines-, Karoshi est un disque qui transpire, à défaut d’être génial, l’humanité et la sincérité dans la démarche ; ce serait quand même un peu bête de passer à côté.