Garp ?!! Rufus Wainwright serait l’auteur-compositeur-interprète de génie que l’on nous décrit à longueur de pages dans la presse française et internationale ? De fait, la révélation de l’année ?
Une première écoute n’avait pas vraiment convaincu votre serviteur du bien fondé des ces affirmations. Mais devant tout le foin fait autour de Rufus Wainwright, il était devenu urgent de se pencher sur la question sérieusement, et de vous informer (mais n’est-ce pas déjà fait ?).
Bien. Rufus Wainwright est le « fils spirituel des crooners d’antan », nous dit le dossier de presse. Si l’on voulait, hâtivement, lui cirer les bottes, il faudrait dire qu’il est le chaînon manquant entre Frank Sinatra et Jeff Buckley. L’âme charmeuse et le ton un peu traînant du premier, le lyrisme écorché du second. Le problème, c’est qu’à l’écoute de ce premier album éponyme, on ne retrouve que des réminiscences de ces assertions. Le rejeton de Loundon Wainwright III a certes un joli petit talent, mais difficile pour autant de considérer les 12 morceaux qui nous sont proposés comme autant de classiques. S’il faut mette en avant quelque chose qui soit positif, ce sera surtout le fait qu’effectivement, Rufus Wainwright, de part sans doute ses influences musicales fort diverses (Beatles, Edith Piaf, la musique classique), ne se laisse pas enfermer dans un genre. Malheureusement, il donne parfois l’impression de se laisser piéger par sa voix (assez expressive au demeurant), si ce n’est sur certains titres vraiment poignants (In my arms, Barcelona) ou originaux (Matinee idol). Ailleurs, il semble souvent à la limite de la plainte spleenétique, et sur le frein, comme s’il peinait à s’extraire d’une gangue. Ce qui ne serait pas étonnant. Rufus Wainwright est encore fort jeune. Peut-être faudrait-il lui laisser un peu le temps de mûrir son expérience musicale, avant de lui mettre sur le dos des titres et des honneurs si lourds à porter…