Le premier album de Nots est, paraît-il, à la hauteur de la furie de leurs concerts. Un océan plus loin, une première écoute de We Are Nots, présenté par ses créatrices comme un disque de weird punk laisse penser qu’à défaut d’égaler d’autres champions du style, comme The Daily Void, il n’aurait pourtant pas à rougir de la comparaison. Originaire de Memphis, ce groupe intégralement féminin est depuis 2011 le projet de deux complices de longue date, Natalie Hoffmann (guitare et chant principal, ancienne bassiste de Ex-Cult) et Charlotte Watson (désormais à la batterie). Duo, puis trio, puis duo à nouveau, Nots évolue jusqu’à sa formule définitive : le line-up s’élargit cette année avec l’arrivée de Madison Farmer (basse) et d’Alexandra Eastburn, qui n’avait jamais touché un clavier de sa vie. Il est temps pour Nots de sortir son premier opus.

 

 

Weird punk n’est en fin de compte pas une étiquette stupide. On trouve bien dans We Are Nots tous les éléments classiques et constitutifs du punk (rythmes et jeu de la batterie, attaques de la guitare, montées/descentes de la basse, tics vocaux) mais associés à une forme de retenue, d’élégante délicatesse, que l’on se gardera bien de relier à la féminité des génitrices de l’album. Alors oui, derrière Hoffmann, tout ce petit monde chante (braille?) sur les temps, respectant les codes du genre, des breaks aux reprises, mais sans se vautrer dans la facilité du cliché.

La batterie et la basse forment un bloc compact, garant de la dynamique des morceaux. La guitare, vive et percutante, offre toute latitude au chant de flotter dans son placement. La présence d’un clavier permet à Nots d’élargir ses horizons et de sortir du carcan de l’énergie pure. Néanmoins, un peu paresseux, il apparaît plus sur We Are Nots comme un lien entre la basse et la guitare qu’entre celle-ci et la voix. Un peu faux, il résonne comme une case biffée devant la mention « punk et sons bizarres » d’un cahier des charges. Cette réserve tout à fait subjective ne gâche pas l’écoute d’un disque que l’on ne peut que trouver sympathique, en dépit de la connotation parfaitement critique et péjorative que revêt cet adjectif aujourd’hui.

 

 

Le premier effort du groupe de Memphis est agréable, à défaut d’être incontournable. Sans innover ou réellement surprendre, mais heureusement plus proche de l’héritage de The Androids of Mu que de celui de The Slits, We Are Nots tient la distance et ne lasse pas. Poétiques et minimalistes, les textes sont soignés, évoquent le cri et le leitmotiv. A défaut d’avoir la dimension haiku de The Urinals, ils illustrent des thèmes rageurs qui assurent de la sincérité et de la spontanéité d’un groupe que l’on aimerait découvrir sur scène. Honteux, l’homme moderne ferait alors semblant de ne pas avoir d’yeux que pour Charlotte Watson, la collectionneuse de disques.