All stars band de circonstance, ce groupe réuni à l’initiative de Francis Dreyfus fit l’affiche d’une soirée d’anniversaire (les trois bougies du label), au début de l’été 1994 : autour de la star musclée de la basse électrique et du pianiste français, le guitariste Bireli Lagrene, le batteur Lenny White et le saxophoniste Kenny Garrett vinrent jouer le jeu d’une jam session impromptue, festive et sans prétentions. « C’était la première fois que je jouais avec Michel Petrucciani, expliqua plus tard Marcus Miller, et ce fut un réel plaisir de se découvrir devant tous ces fans ». Si les musiciens comme lesdits fans ont très vraisemblablement gardé un excellent souvenir de cette « Dreyfus night », on reste dubitatif quant à l’utilité de ressortir des cartons la bande de leur bœuf sans lendemain : au-delà du plaisir, toujours vif, d’entendre le piano de Petrucciani, l’aspect très approximatif des trois interprétations retenues laisse un goût d’inabouti et de vague arnaque à la célébrité. Attaques imprécises, petits ratages réguliers, mésententes, déséquilibres et tentatives avortées, tout en témoignant de la fraîcheur de la rencontre des cinq musiciens, donnent une galette à peu près dénuée d’intérêt hors du contexte ludique de la soirée événement dont elle est tirée. Si le Looking up de Petrucciani reste à peu près sauf, le Tutu de Miller s’en sort moins bien ; les collectionneurs compulsifs des disques du pianiste français et du bassiste américain (ils sont légion) cèderont par souci d’exhaustivité et par indulgence pour l’aspect décousu de l’ensemble, les autres peuvent passer leur chemin.