Après quinze ans d’une carrière rock irréprochable, les Thugs se séparent (leur batteur les quitte) et ce Tout doit disparaître est donc leur dernier album, probablement un de leurs plus riches. A partir d’une formule a priori simple (des guitares, des guitares, encore des guitares, une rythmique implacable, des voix sensibles et sensées, une basse souple et solide), les Thugs ont réussi à se distinguer et à perdurer en France et dans le monde, notamment aux Etas-Unis, où ils jouissent d’une reconnaissance et d’une crédibilité rarement offertes à des groupes français. Tout simplement parce qu’ils font du rock avec une efficacité, une sincérité et un talent rares.

This world is looking great ouvre le disque, manifeste pour continuer à résister et à se battre, suivi de Gone, sa rythmique en roulés et son xylophone. Rester debout est leur troisième titre en français : ballade lente et lancinante, ce titre confirme que leurs tentatives en français sont loin d’être ratées. Mio Mio est un pur chef-d’œuvre de pop punk véloce à la Wedding Present, aussi émouvant que The River, qui pourrait arracher des larmes au plus endurci des adversaires de pop. Heureusement, on se ressaisit avec I’m scared et de bonnes vieilles guitares profondes qui s’enrobent autour d’une structure très Feelies. Good way, plus lent, presque psyché, envoûte plus que In town, qui prend la route du punk, comme le faisaient si bien les Hard-Ons. Les titres des Thugs sont souvent plus des chants que des chansons, des exhortations peut-être, mais surtout pas des hymnes.

Cependant, il y a des innovations sur Tout doit disparaître et Your smile en est la preuve flagrante : une boîte à rythmes calme (la première de l’histoire du groupe), de l’orgue, nous voici transportés dans des territoires chers à Sonic Boom : un titre planant, un doux moment de poésie. Que les vieux fans se rassurent, du mordant, il y en a : les Thugs savent toujours ne pas plaisanter et botter le cul de l’auditeur, comme le prouve I’m just kidding et son refrain acerbe : « I’d like to kick your ass ! ». Le Hamac, en français, est magnifique de simplicité : une berceuse pour rockers. Enfin, le disque se termine par I loved this way, probablement conçu comme un chant d’adieu, puisque le groupe y récite à la chaîne de nombreux titres de leurs chansons et albums. Un roulement de tambours qui serre le cœur. Refrain : « You know, I really loved this way ».
Nous aussi, les gars, on a aimé ça, plus que vous ne l’imaginez. Peut-être que tout doit disparaître, mais on aurait préféré que vous restiez. Grand disque, grand groupe, en espérant que ce n’est qu’un au revoir…