Nouvel album du très productif Kool Keith (alias Keith Thornton, ex-Ultramagnetics MC’s, rappelons-le) après l’amusante production sous le pseudo de Dr Dooom, dont il ne retient que la perruque en plastique qui a fait de lui le véritable Elvis noir. N’y allons pas par quatre chemins, ce disque est son meilleur depuis le Dr Octaon sorti chez Mo’Wax : phrasé coléreux, effets de science-fiction partout, rythmiques implacables, discours impeccable de drôlerie et de mordant, un brin de folie, tout y est.

Principalement produit par Nightcrawler, le disque comprend 17 morceaux riches et obsédants. Déclaration d’intention dans l’intro (sur un sample de Trans Europ Express de Kraftwerk) : il repart en guerre contre les rappeurs foireux et leur arsenal de gadgets musicaux et graphiques ridicules (Why are you staring at me in those Timbaland boots ? / Using fish eye effects in your videos etc.). Ensuite Lost in space attaque fort et lourd tandis que Rocket on the battlefield invente le rap psychédélique (tout en n’étant pas loin d’Eminem). Livin’astro est un petit chef-d’œuvre d’efficacité minimale : un Casio, un banjo, et je vous emmène loin dans les astres. Supergalactic lover s’adresse aux filles (donc il y a des chœurs de lover) et fait dans le funk sensuel et parodique, et dans la même veine le vocoder ultra funky de Master of the game évoque aussi bien Prince que les p’tits gars de la côte Ouest dans leurs grosses bagnoles : very funny.

On passe sur I’m seein’ robots et Static (aux effets intéressants) pour se pencher sur le fameux Black Elvis, avec son piano contemporain et groovy à la fois : un manifeste réussi, et le meilleur morceau du disque avec Lost in space, Livin’ astro ou le dernier I don’t play. Ensuite, les morceaux s’enchaînent et se ressemblent mais leur production intelligente et subtile et la façon unique qu’a Kool de rapper empêchent la monotonie de s’installer. Rien que l’hilarante parodie de liste de remerciements inscrite dans la pochette vaut le détour (I would like to thank all the Sony artists : I got all your Cds for free / I would like to thank all my porno friends, etc.). Aisément le meilleur album de rap « décalé » de l’année avec celui de Sensational (Corner the market).