Les héros ne meurent jamais. Sortis d’un cauchemar de dix ans avec le dynamique, mais inégal Evergreen, Ian McCulloch et ses hommes-lapins (en fait, le seul rescapé de l’aventure est Will Sergeant -Les Pattison ayant décidé de mettre les voiles) poursuivent leur rédemption artistique. Plutôt à la vitesse de la tortue qu’à celle du lapin donc. Et ça fonctionne vraiment bien sur ce What are you going to do with your life ? Car si tout n’est pas pleinement satisfaisant sur cet album (notamment les deux titres, plutôt faibles, avec les Fun Lovin’ Criminals), il contient parmi les meilleures compositions de McCulloch, dont la paresse, c’est bien connu, n’a d’égale que sa grande gueule (pour se faire une idée du net regain de forme du gars, l’auditeur se reportera donc à Rust, History chimes et au final de Fools like us).

Quant à Will Sergeant, on ne le soupçonnait plus de savoir de nouveau tenir une gratte -acoustique sur plusieurs titres- avec autant de sobriété. Définitivement affranchis des références encombrantes -Television/Velvet Underground- qui avaient jusqu’à présent balisé leur parcours, les deux de Liverpool ont gagné en maturité et en quiétude. Finie l’excitation juvénile, place à une forme de sérénité (musicale) d’autant plus touchante qu’elle est accompagnée de textes acérés, certes mâtinés d’une certaine nostalgie (en gros : j’étais doué, j’ai écouté les sirènes de la gloire et j’ai failli tout gâcher jusqu’au bout), mais d’une réelle justesse. Reste les deux grandes forces de l’album : les arrangements de cordes, soyeuses à souhait sans tomber dans la démonstration de virtuosité, et surtout la voix de McCulloch. Ce fumiste a mis, pour la première fois de sa carrière, ses rêves démesurés à portée de la réalité : on connaissait l’excellent chanteur, mais avec What are you going to do with your life ? il s’impose enfin comme songwriter.