Difficile d’y échapper, difficile de faire l’impasse sur les deux lascars de Cassius. Le parcours de 1999 est tellement classique qu’on ragerait presque de devoir rapporter un tel cliché. Ce sont « les-deux-frenchies-qui-ont-fait-un-carton-en-Angleterre »… Passons, d’autres l’ont fait avant eux, et rien n’indique que les goûts de nos voisins britons fassent office de dogme. À parcours classique, disque classique, les deux compères de Cassius, qui ont déjà officié dans le genre (Motorbass, La Funk Mob), cuisinent une house garage bien dégagée derrière les oreilles, efficace, sans autre but que de faire se remuer l’internationale des fessiers adipeux de la planète. À l’opposé d’une démarche de plus en plus minimaliste et expérimentale au sein de la scène disco-dance française -que ce soit la house ascétique du jésuite Garnier ou la techno binaire et rigolote de Le Tone- Cassius se montre franchement traditionaliste et totalement exempt de la moindre distanciation. Leur musique est intrinsèquement délivrée d’une quelconque spécificité hexagonale et finalement prédestinée à rencontrer un succès dépassant nos petites frontières…

Alors ? Beaucoup de bruit pour rien ? Oui et non… Nettement moins putassier que Daft Punk qui n’hésite pas à lorgner du côté du big beat histoire de ratisser plus large, Cassius n’a pas la prétention d’être un hitmaker. Sans doute plus artisans qu’artistes, Zdar et Boombass cuisinent une house qu’on croyait disparue et obsolète à force de la voir détournée par les spécialistes du genre. Les ingrédients sont simples : une pincée de hip hop, un peu de techno, de disco ; emballez, c’est pesé. Cette humilité (volontaire ?) force le respect mais finit par leur jouer des tours. En effet, l’album s’écoute sans heurts, passe comme une lettre à la poste… Rien qui accroche vraiment, qui détonne, qui fasse lever l’oreille, bref qui « réveille ». Paradoxe : 1999 est à la fois monolithique et cohérent mais ressemble à l’une de ces compiles house éditées par Nova. Tout juste admettra-t-on que la version remix du single Cassius 1999 qui clôt l’album apporte enfin un peu de relief, ou que le morceau La mouche se démarque un peu par sa (relative) bizarrerie… C’est mince… Avec un titre pareil, on s’attendait à ce que 1999 soit l’album de house ultime, un album « fin de siècle » au propre comme au figuré. Au final, on obtient un disque agréable à l’écoute, pour lequel on n’a pas vraiment envie de se battre, ni pour le défendre, ni pour le descendre…