On a beaucoup écrit sur Nianfuké, le dernier album d’Ali Farka Touré. Mais peu de gens ont voulu saisir ce qui demeure son message le plus généreux en ce moment, au-delà du fait qu’il daigne encore jouer pour le plaisir de ses fans, malgré ses autres occupations, agricoles entre autres. Il avait pourtant pris le risque de sortir au même moment l’album de son protégé, Afel Bocoum, et le sien. Cela aurait dû mettre la puce à l’oreille à tout le monde. Car le maître a décidé par ce geste de soutenir un peu plus la jeune garde. Il l’a toujours fait.
Rokia Traoré, Lobi Traoré sont quelques-uns de ces artistes qui pourraient témoigner de sa bonté de grand-frère en musique. Mais cette fois-ci, le message est plus appuyé. Désormais, il ne fera plus que de très rares apparitions. Son souhait est qu’on reconnaisse en ce jeune homme autant de talent qu’il lui en a fallu pour arriver à concurrencer les fleurons de la scène blues américaine sur un plan international. Son jeu de njarka ou de njurkle (violon et guitare monocorde), ses solos de six cordes, ses mélodies de plus en plus dépouillées, son inspiration qui sent le terroir, sa conviction d’avoir donné le meilleur de lui-même sur chacune de ses compositions…

Tous ces éléments se retrouvent sur ce premier album d’Afel Bocoum, qui s’était déjà illustré sur l’album culte du parrain (The Source) et qui le suit également en disciple attentif depuis plus de 20 ans. Il est des différences cependant sur lesquelles Ali Farka souhaite insister pour mieux appuyer le talent du jeune homme. Son style s’accompagne d’une certaine rondeur sonore. Son jeu est plus serein, plus confiant et moins torturé par le sens de la vie. Ce doit être une affaire de génération. Alkibar signifie « messager de la grande rivière » en langue Sonraï. Saura-t-il se prêter au jeu ? En tout cas, l’ensemble se prête bien au jeu de la critique heureuse. A découvrir sans tarder !