Autour de Versailles rive gauche, moyen-métrage qui le fit connaître en 1994, sont réunis ici tous les films « personnels » de Bruno Podalydès, c’est-à-dire ceux réalisés à partir du beau Dernier mouvement de l’été, tourné en 8mm en 1989. Des autres -films d’entreprise, publicités-, Podalydès confiait aux Cahiers lors de la sortie de Dieu seul me voit (1998) qu’ils avaient tous en eux quelque chose de lui-même. A quoi ressemblent une pub ou un film pour une société d’entretien des autoroutes quand un cinéaste y met un peu de lui-même ? Ont-ils cette netteté du trait, cette belle évidence et cette malice légère, la simplicité astucieuse du rapport à la machine cinéma qui caractérise les films « personnels » de Podalydès ? En leur absence, le DVD n’y répond pas, mais on ne saurait en douter, tant tout ce qui est montré là (courts-métrages, pilotes pour programmes tévé, petits exercices), même si tout n’est pas abouti, ne semble appeler qu’un qualificatif : simple.

Introduisant lui-même chaque ensemble de films, Bruno Podalydès dit qu’il a cherché pour son film suivant Versailles rive gauche le titre le plus simple qui soit, et a choisi : Voilà. Voilà : un père (Denis Podalydès) emmène son bébé (Jean, en réalité le fils de Bruno) en balade pour lui montrer la mer. Et dans Voilà, quand il s’agit de montrer en images que le temps a passé, tandis que se poursuit off le récit de l’aventure d’une petite sardine, du sable glisse à travers les doigts d’une main, en même temps qu’une nuit américaine prévient de la venue du soir. Dans Versailles rive gauche, l’ellipse est figurée par un panoramique sur un groupe de personnages, où celui qui est bord cadre gauche au début du plan est bord cadre droite quand le mouvement s’achève. Du bricolage, mais simple. Ces astuces, le cinéaste les explique dans le commentaire du film qu’il fait en bonus, raconte comment il s’y est pris pour tourner dans l’exigu appartement versaillais qui lui servit de décor quasi unique. Le récit de la fabrication est, encore et toujours, simple. Comme le bonus qui accompagne Voilà : Anne-Françoise Brillot, la mère du petit Jean, a monté les images captées en vidéo par la caméra. Le cadre est le même que celui du film, mais entre les prises la vidéo continue d’enregistrer et seul un frissonnement de l’image signale que le moteur est lancé. C’est un making of, mais qui est filmé en même temps et par le même cadreur que le film lui-même, de manière aussi sélective et aussi fragile que le film lui-même. L’idée est précieuse, car c’est en quelque sorte le film qui regarde sa propre fabrication, comme depuis un œil intérieur, une caméra embarquée.

A tout cela une leçon, quant à l’usage du cinéma. Et du cinéma de Bruno Podalydès, qui n’est jamais dans le commentaire de lui-même ou du genre qu’il aborde, mais bien plutôt, dans sa fabrication comme dans son exécution, dans la quête d’une connexion directe et malicieuse entre l’envie de réaliser un film, la joie de le faire, et le plaisir de le voir.