Conçu d’après un scénario écrit par la cinéaste Jeanne Labrune, puis remanié par Tom Stoppard pour être adapté en anglais, le projet Vatel a pris une envergure croissante avec l’arrivée à ses commandes du réalisateur Roland Joffé (Oscar du meilleur film pour La Déchirure en 1984 et Palme d’or pour Mission en 1986). Et la composition d’un casting flamboyant qui réunit Uma Thurman, Gérard Depardieu et Tim Roth. Si le cinéaste ne renouera sans doute pas avec le succès critique que connurent ses deux premiers opus, force est de constater qu’il se sort honorablement de cette reconstitution historique à gros budget.

Sa principale qualité est d’avoir su rythmer son film grâce à une mise en scène dynamique qui multiplie les points de vue et les mouvements à l’intérieur du cadre. L’histoire tragique du fameux intendant Vatel devient entre ses mains un honnête divertissement dans la pure tradition hollywoodienne. François Vatel, maître de cérémonie du Prince de Condé, est chargé par ce dernier d’organiser trois jours de fête en l’honneur de la venue de Louis XIV. Son honnêteté et son sens de la perfection seront mis à rude épreuve par les intrigues qui composent la vie de la cour du monarque. Légèrement romantisé, le film modifie quelque peu la légende de Vatel qui attribuait l’origine de sa mort à une sauce ratée et met plutôt en avant la thèse du chagrin d’amour causé par la belle Anne de Montausier (Uma Thurman).

Vatel, c’est aussi l’occasion pour Roland Joffé de nous offrir une description des fastes royales servie par des décors et des costumes somptueux. De ce point de vue-là, le budget se justifie aisément et cette fidélité aux moindres détails ravira les érudits d’histoire de France. Reste que le cinéaste dirige son film en bon artisan et non en artiste. Si tous les ingrédients matériels sont correctement agencés pour nous faire croire à cette reconstitution, le film ne se départit pas d’un lourd académisme. Telle une mécanique bien huilée, il déroule ses péripéties sans prendre le moindre risque, à l’image de Gérard Depardieu qui ânonne son texte en vieux routier de l’interprétation. Roland Joffé passe aussi trop rapidement sur les liens qui unissent ses personnages et se contente d’une description superficielle qui n’échappe pas aux clichés. Du coup, la passion qui unit François Vatel à Anne de Montausier reste énigmatique, voire incompréhensible. Avec Vatel, Roland Joffé adopte l’attitude de rigueur en matière de blockbusters historiques. Celle appliquée, par exemple, par Luc Besson dans son Jeanne d’Arc : simplifier pour ratisser large.