C’était le début des années 80, Almodovar tournait des films pipi-caca-prout- sexe-drogue-rock and roll, Cecilia Roth y jouait des rôles de junkie ou de nympho (Sexilia dans Le Labyrinthe des passions). Aujourd’hui, le cinéaste lui offre un remarquable come-back dans un mélo flamboyant digne d’un Douglas Sirk. C’est maintenant le temps d’aimer et de mourir, celui d’une mère dont le fils vient de décéder dans un accident et qui part pour Barcelone afin de l’annoncer au père qu’elle n’a pas vu depuis 18 ans. Placé sous le triple parrainage d’All about Eve, d’Un Tramway nommé désir et d’Opening night, Tout sur ma mère est un hommage aux femmes et aux actrices. Il n’est question que d’elles, d’une mère (Manuela-Cecilia Roth) dévorée par le chagrin, d’une actrice (Huma-Marisa Paredes) qui se meurt d’amour pour une autre, de l’absence d’amour entre une mère et sa fille (Rosa- Penélope Cruz), nonne enceinte d’un travelo séropositif. Même les hommes n’ont qu’un rêve : devenir des femmes ; tel Agrado (Antonia San Juan), qui a passé sa vie à transformer son corps à force de silicone pour devenir celle qu’il avait toujours rêvé d’être.
L’ensemble du film est au féminin, mais cet gynécée n’est plus au bord de la crise de nerfs, les femmes qui la composent réussissent le tour de force d’allier à la fois exubérance et profondeur des sentiments. Manuela quitte son travail d’infirmière, et se retrouve à Barcelone comme secrétaire particulière d’Huma. Elle est une actrice de la vie, jouant différents rôles pour oublier la mort de son fils Esteban. Rarement on a pu ressentir une telle fusion entre un cinéaste et ses interprètes, toutes époustouflantes. Almodovar, avec Tout sur ma mère, est atteint par la grâce. Il réussit là son meilleur film d’une carrière pourtant déjà riche.