Enième retour du tueur au puzzle, héros de l’une des franchises les plus nulles de l’histoire du cinéma d’horreur. Les principes, rappel : le scénario est une suite de saynètes où un masque en pâte à sel lance des défis à ses victimes qui choisissent entre une mort certaine ou une automutilation corsée (« tu peux t’écorcher vif pour échapper à la bombe qui explosera dans une minute »). Distinctes les unes des autres, ces épreuves se rassemblent à la fin et forment une machination très très machiavélique. La mise en scène consiste en un pot pourri des pires effets clipesques (ultra-découpage, accélérés, sampling d’hurlements) et respecte la sensibilité du spectateur (jeune, boutonneux, qui écrit des poèmes gothiques après minuit à la lumière d’une bougie noire) en laissant hors champ l’horreur proprement dite. La photographie est une copie carbone de Seven, film étalon des créateurs de Saw qualifiant le coup de bluff final de « un truc de ouf ». Le casting réunit les pires acteurs d’Hollywood : troisièmes couteaux, bimbos fatiguées, ringards bons pour l’hospice. A l’exception de Tobin Bell, qui joue le tueur fou, une bonne tronche improbable à la Michael Berryman.

On rigole pas mal dans ce troisième épisode, plus rachitique encore que les précédents (Saw 1 et Saw 2). C’est un nanar, un vrai de vrai, où la passion du genre et l’exténuation du concept avancent main dans la main. D’abord parce que les scénaristes n’ont plus d’essence dans le moteur et passent leur temps à plancher sur la mécanique défaillante de l’intrigue. Il y a toujours des morts improbables dans Saw, phénomène trahissant toujours quelques maladresses dans l’écriture : ici un type, sauvé précédemment par un autre (le premier servait d’enjeu moral au second), finit par se prendre une balle perdue parce qu’il ne sert plus à rien. De même, on n’hésite pas à boucher quelques trous en insérant des pans entiers des films précédents, on dresse des intrigues parallèles foirées pour tenir 1h47. Mais cet affaissement général finit par payer : la saga nous offre un beau scalp à la perceuse en un seul gros plan (le monteur avait dû aller pisser) avec pour unique effet sonore le bruit de la mèche au contact de l’os. De loin, le plus grand morceau de bravoure de la série.

Guillaume Loison