A l’instar de son collègue new-yorkais Woody Allen, Amos Kollek enchaîne les longs métrages à raison d’environ un par an depuis le succès inattendu en France de Sue perdue à Manhattan. Une prolificité en grande partie due à la légèreté des tournages et au moindre coût de ces chroniques intimes qui prennent toutes place au cœur de Manhattan. Entre déglingue craignos (Sue et Fiona) et humour déjanté (Fast food, fast women), les films de Kollek mettent invariablement en scène des personnages en quête d’amour avec un net penchant pour les marginaux, célibataires paumés, retraités esseulés ou autres junkies en bout de course. Queenie in love ne déroge pas à la règle et risque bien d’ériger en système figé les tranches de vie proposées par le cinéaste.

Comme d’habitude, l’ensemble du film repose sur un personnage féminin central autour duquel gravite une série d’individus. L’absence au générique d’Anna Thomson, égérie coutumière du cinéaste, est ici comblée par la prestation dans le rôle-titre de la « jeunette » et bavarde Valérie Geffner. Excentrique et exubérante, Queenie est aux antipodes des héroïnes mélancoliques incarnées par Anna Thomson. Là où Amos Kollek l’a voulu délirante (Queenie parle fort et librement de sexe) et un brin rebelle (Queenie adore se changer dans la rue), on a du mal à voir autre chose qu’une gosse de riche qui se la joue arty et passe le plus clair de son temps à animer de ses décolletés et minijupes les coffee shops de l’East Village. En attendant que son improbable carrière d’actrice démarre, Queenie décide un jour de jeter son dévolu sur Horace, paisible policier à la retraite (Victor Argo). On suivra entre-temps la psychanalyse foireuse de ce dernier, les déboires conjugaux de ses amis, un couple d’ex-gangsters qui organise des orgies sadomaso à la maison, et les atermoiements de Tzocki, la meilleure amie de Queenie, sur le point d’enterrer sa vie de jeune fille.

Pas de doute, Queenie in love sent à plein nez le classique petit film indépendant new-yorkais avec sa dose de poses anticonformistes, histoire de remplir le cahier des charges du parfait objet underground. On est d’autant plus dur avec Amos Kollek que celui-ci nous avait habitués à moins d’esbroufe et à un ton nettement plus dérangeant. Ici les amours gérontophiles contrariées de Queenie relèvent plutôt de la bonne blague de potache, à l’instar du film dans son ensemble qui joue assez malheureusement la carte de l’ironie distanciée. Difficile alors de ne pas considérer Queenie in love comme un décalque manqué de sa précédente comédie, autrement plus acerbe, Fast food, fast women.