Norvégien, porté par des airs punks, le premier film de Joachim Trier suit deux copains de lycée apprentis écrivains : l’un publie, l’autre pas. L’originalité du scénario apparemment pas folichon tient aux trajectoires croisées entre les deux personnages : les rôles s’inversent, le jeune prodige sombre, l’autre reprend le dessus. Cette logique contradictoire produit une sorte de contagion fraternelle assez touchante entre les deux personnages : le destin des deux amis se fait en miroir comme par solidarité. Le récit s’amuse à bifurquer, à multiplier les possibles puis à rebrousser chemin avec légèreté et dessine dans ce petit jeu de signes, ruptures et répétitions obsessionnelles, le schéma de la reprise kierkegaardienne (Reprise est le titre original). Pendant la première demi-heure, le film est fait de petits bouts rassemblés (brusques arrêts, fondus au noir, irruptions d’images documentaires ou super 8) et bondit assez agilement des uns aux autres avec une mise en scène bien balancée.

Pourtant, en cours de route cette vivacité tombe dans la pose. Malgré ses bonnes idées et la singularité de son projet, Nouvelle donne n’échappe pas à l’écueil de la caricature qui menace souvent la représentation de l’écrivain (a fortiori jeune et passionné) au cinéma. Les affres littéraires deviennent difficilement supportables lorsque ces jeunes cravatés jouent au cercle des poètes disparus. Gros arrivage de clichés pour le portrait de l’intello malin tandis que le scénario de la reprise finit par tourner au ressassement. Plus pénible sans doute, la suspecte disparition des femmes au milieu de la bande de potes attardés : au mieux elles finissent en infirmières attendries, au pire en hystériques nymphomanes, enfin, le plus souvent, elles empêchent le bellâtre de devenir le grand écrivain. A la sobriété élégante des premiers moments vient s’agglutiner tout l’attirail lourdingue du film de copains.