A force de vouloir construire un cinéma de genre franco-français, la production nationale enchaîne les tentatives les plus saugrenues. Nid de guêpes en est une sorte d’aboutissement pathétique. La première raison de l’échec de ces films à vocation de séries B boostées est son manque d’inspiration : entre remakes ineptes de slashers US ineptes (Promenons-nous dans les bois) et tentatives de réconciliation avec une identité européenne (Le Pacte des loups), aucune trace pour l’instant du moindre gramme de singularité ou d’alternative potentielle. Nid de guêpes pousse ici ce syndrome de l’importation à son point-limite, puisqu’il n’est rien moins qu’un remake au plan près, à peine avoué, d’Assaut de John Carpenter.

Le pire, c’est qu’on se rend compte de cette évidence après trois-quart d’heure de métrage. La mise en scène, à l’exception de scènes de gunfight bien trempées (saturation d’éclatements et d’explosions jusqu’à la rupture), est si empruntée et sans personnalité que tout coule dans une sorte d’afflux de rebondissements et de figures totalement dénaturées. La multiplicité des personnages, inexistants, empêche toute identification. Les dialogues, d’une rare indigence, ruinent le premier degré ultra-respectueux du film. Quant à la maîtrise de l’espace de Siri, très brouillonne, elle est à mille lieues de celle, sèche et géométrique, de son modèle. Le résultat est un film hybride, oscillant entre poses maniéristes parfois réussies (les méchants, spectres noirs et invisibles) et ramassis de clichés sans profondeur. Plus que le spectacle proposé, souvent honnête, c’est l’ambition toc du film qui afflige ici. Sous couvert d’être un remède branché aux films d’auteur parisiens maudits par la culture du « jeune cinéphage enragé » à la Jan Kounen, Nid de guêpes se vautre dans un académisme plus insidieux, celui inhérent à l’idée de cinéma d’exploitation.

Le grand cinéma d’exploitation (américain, italien, hong-kongais) puisait ses racines dans des cinématographies dont il était le résidu alternatif, jouissif et monstrueux. Il revient aujourd’hui en Espagne, grâce notamment à l’anarchie et au bouillonnement d’une production nationale en roue libre. En France, cette tentative de cinéma d’exploitation (la série B, le cinéma de genre) n’est que le produit d’un grand-tout sclérosé et totalitaire. En cela, Nid de guêpes comme avant lui Doberman et consorts, ne sont que des faire-valoir, des dérivés snobinards et boursouflés (soit du sous ou de l’hyper Canal +), jamais une alternative ou une ouverture vers d’autres formes ou expressions cinématographiques. Pour cette raison, Nid de guêpes est moins un film raté que le produit malgré lui du système qu’il mine de contrecarrer avec énergie.