Archi-buzzé et multi-primé (le grand prix accordé ces derniers jours par le jury de Gerardmer est venu continuer une longue série de récompenses), Morse intéresse sur le principe, impressionne parfois, ennuie finalement. Comme Twilight le mois dernier, le film, suédois, est adapté d’un best-seller, et comme lui il se propose de prendre les détours du cinéma de vampires pour conter un récit d’apprentissage. La comparaison s’arrête là : à la fraîcheur teenage de Twilight, il oppose une austérité toute scandinave, contre son approximation charmante et sucrée il fait valoir un sérieux papal et une voyante prétention à l’art. Un marmot souffreteux et planqué sous une blondeur très Le Village des damnés y fait la rencontre nocturne d’une gamine du même âge, fraîchement débarquée dans son HLM. D’ordinaire tête de turc de sa classe, l’angelot reprend du poil de la tête à mesure qu’il se lie à la petite et tandis qu’alentour, les voisins tombent comme des mouches, égorgés vifs. La gamine, comprend-on assez vite, est un vampire.

Outre la facture, il y a, dans le récit, quelque chose qui tient Morse à mille lieues de son faux cousin d’Amérique. Twilight avait l’Autre pour horizon (c’était d’abord un film sur la rencontre, comment elle est possible, quels sacrifices elle implique) ; Morse, à l’inverse, se présente clos dans le circuit du Même. C’est une piste qui, d’ailleurs, n’est pas inintéressante : il n’est pas interdit de voir dans la vampirette une pure projection de l’esprit du mouflet, une sorte d’acting out, de pulsion agressive par quoi il s’autorise à grandir. Le problème est que c’est une clôture qui contamine la forme du film, qui a vite fait d’asphyxier, sous un fatiguant coulis de maîtrise (pas un plan qui ne soit archi-ciselé), l’intérêt qu’il parvient à susciter ici où là. D’où cette désagréable impression, malgré l’efficacité solitaire de certaines scènes, que les personnages, le récit, sont comme en trop dans ces images pétrifiées dans le glacis de la mise en scène. On se lasse vite, alors, de cette prétention à l’étrangeté poétique (on ne s’étonnera pas que le dernier plan renvoie au Martin de Romero) qui fige tout et ne capte rien, rien qu’un chapelet de jolis plans mort-nés.