Le Poulpe est un personnage qui aura quarante ans en l’an 2000. Libre, curieux, contemporain, c’est quelqu’un qui va fouiller à son compte, dans les failles et les désordres apparents du quotidien. Tel est le résumé de la collection « Le Poulpe » ; série qui comporte déjà une centaine de titres (auxquels participèrent entre autres Paul Vecchiali, Romain Goupil, Gérard Lefort, Noël Simsolo…). Le scénario du film Le Poulpe, première adaptation cinématographique de la collection, fut écrit par trois écrivains : Jean-Bernard Pouy (La Petite écuyère a cafté), Patrick Raynal (Arrêtez le carrelage) et Guillaume Nicloux (Le Saint des seins), et réalisé par ce dernier.
Glandeur et petit arnaqueur, Gabriel Lecouvreur, vit avec son amie Cheryl. C’est pas toujours la joie, surtout que celle-ci s’amuse à fricoter avec ses copines. Ils décident de partir à Morsang, petite ville de l’Ouest de la France, où la tombe des grands-parents de la jeune fille vient d’être profanée. Gabriel, alias Le Poulpe, n’en restera pas là : qui sont ces enfoirés qui lui font payer une fortune pour la remise en place du cimetière ? Le couple s’en va alors chercher les coupables, mais ce qu’ils ne savent pas encore, c’est qu’ils s’engouffrent dans une affaire bien compliquée…
Renfermant l’action dans un petit port, les scénaristes limitent de même le nombre d’intervenants. Tout vient de là, on y reste, on résout le tout, et on se casse. C’est simple, Le Poulpe contrôle. Et c’est précisément ce qui nous rattache le mieux au film : on voit rapidement quelle place occupe X ou Y, qui il faut écouter, disculper, ne pas oublier ou éliminer. Mais cette situation engage aussi un langage approprié, propre à chaque personnage : le barman pince sans rire et blasé (Philippe Nahon) ; le « collègue » du Poulpe, Pédro, vieux soûlard ; la Fouine, qui donne l’impression d’être continuellement branché à l’ecsta… Mais les plus impressionnants restent Jean-Pierre Darroussin et Clotilde Courau : lui, en chaussures blanches de plastique ou en espadrilles, reste impassible, la tête froide, répétant à tout va : « n’importe quoi, lui » ; elle, habillée de jaune (en latex et moumoute), complètement larguée puisqu’elle pense prendre de tranquilles vacances…
Le Poulpe ne cesse donc de nous faire rire par ces situations loufoques. C’est le comique de répétition qui est d’usage ici. Guillaume Nicloux filme ces aventures sans prétention, en gardant un rythme pour le moins plaisant. A noter une bande-son pour le moins bien choisie : The Pixies, Nick Cave, Craig Amstrong, mais aussi des titres plus anecdotiques comme ceux de Luis Mariano et Fréhel (la belle mama de Pépé le Moko). Bref, ça valait bien une grande campagne de pub !