Dans les nombreuses images entrevues pour la promo de King Kong, on a pu voir Peter Jackson se rendre à une première du film avec un vieux bout de ferraille qu’il serrait aussi précautionneusement qu’amoureusement dans ses mains : la marionnette qui avait servi pour le film de Shoedsack et Cooper. Si La Crypte avait dû être un événement médiatique similaire, parions que son réalisateur Bruce Hunt, aurait brandi devant la presse un monstre miniature en caoutchouc sorti de n’importe quelle série B des années 50, truffée de bébêtes gigantesques, partant à l’assaut chaque semaine des doubles programmes des drive-in.

Il y a quelque chose de déplacé à voir La Crypte arriver dans les luxueuses salles de multiplexes, tant ce film est marqué dans sa chair par une appartenance aux salles de quartier d’antan : celles des plaisirs enfantins, quand on a encore les yeux qui s’ouvrent grand à l’apparition d’une taupe mutante géante et carnivore ou de ptérodactyles aux ailes et griffes en carton-pâte qui cherchent des noises au premier Doc Savage venu. La Crypte est une incongruité à l’ère des blockbusters rutilants qui redoublent d’efforts pour rendre réaliste leur contenu. Hunt, lui, retourne à l’innocence du cinéma américain de papa : scénario prétexte, invraisemblances à tous les étages camouflées sous un bla-bla scientifique de pacotille, personnages taillés dans le stéréotype… Tout est là pour confectionner un sous-produit à l’image des nanars italiens d’il y a vingt ans bricolant avec des bouts de ficelles de navrantes contrefaçons de succès hollywoodiens.

La Crypte est pourtant sauvée de son étiquette de Jurassic park frauduleux par la combinaison du vague savoir-faire d’une équipe technique et de la volonté d’entertainment innocent. Pas de pari technologique façon Lucas, pas de surenchère façon Zemeckis, juste l’envie d’une plaisante série B du dimanche après-midi qui se contrefout de la politique des auteurs. Hunt n’est qu’un employé faisant correctement son boulot. La Crypte n’entrera jamais au panthéon des films d’épouvante mythologiques auxquels il fait souvent des clins d’oeil, d’Alien à La Nuit des morts vivants, mais garantit un certain dépaysement souvent oublié par l’appareil trop lourd des films d’aventures actuels. Pointer du doigt la part de légèreté qu’a perdue Hollywood depuis les productions Roger Corman, voilà ce qui fait l’intérêt du film, son charme.