Dans un futur indéterminé, des prisonniers sont contraints de participer à des courses mortelles et retransmises en direct. Histoire de booster l’audimat, un ex-pilote (Jason Statham) est enfermé de force pour endosser le rôle de Frankenstein, un concurrent masqué récemment décédé. Très vite, il devient le chouchou du public. Sous ses dehors bourrins de remake décomplexé, La Course à la mort cache un joli film-symptôme. Au côté Cannonball et contestataire de l’original, Paul Anderson a substitué un métrage dégénéré à mi-chemin entre Running-Man et Carmaggedon, un mutant informe tout droit échappé de la fin des années 80, mais soumis au régime d’images de l’ère numérique. Vous avez dit Frankenstein ?

Film de surface, La Course à la mort ne s’embarrasse d’aucun background ni profondeur de champ. Seuls comptent ici la prison, le circuit qui l’enserre et la course qui y fait rage ; le reste, les spectateurs, le contexte, est remisé dans le hors-cadre, réduit aux chiffres froids de l’audimat et à quelques apartés. A la limite, peu importe les enjeux ou le but, ici ne prévaut que la logique circulaire de la piste, le spectacle barbare et debordien d’un film qui ne veut en venir à rien d’autre qu’à lui-même. Sans rivaliser avec le jusqu’au-boutisme et la beauté théorique du Rollerball de McTiernan, le résultat relève presque du bis conceptuel. Sorte de carcasse allégée de ses habituelles justifications narratives, le film s’incarne tout entier dans ses bolides surpuissants et enquille les carambolages gores avec un entrain communicatif.

Comme conscient de cette nature profondément superficielle et déliquescente, Anderson habille son bébé des codes esthétiques les plus impurs. Dans La Course à la mort, les gimmicks du jeu vidéo se mêlent à la doxa télévisuelle, les métaphores homo aux figures sado-masochistes, pendant que des bombasses en mini-short roulent du cul façon clip de hip-hop. Il y a quelque chose de jubilatoire à cette avalanche de signes parfaitement erratiques, un plaisir coupable où la vulgarité finit par faire sens. S’il reste loin de la poésie cinétique d’un Tony Scott, cet objet sans foi ni loi confirme en tout cas une tendance lourde de ces derniers mois : après Hyper tension, Doomsday et Wanted, le cinéma mainstream profite à plein de sa poussée de fièvre décadente.