Jacqueline est une prostituée septuagénaire, et sa vitrine se trouve à l’intérieur du sex-shop tenu par Philippe, son souteneur, qu’elle dépanne d’un strip-tease à l’occasion. Stop ! Ceci n’est ni un essai scabreux sur la misère sexuelle contemporaine ni un remake gérontophile de La Dérobade, mais bel et bien une comédie, excellente au demeurant. Quelques précisions s’imposent afin de mieux cerner le ton du film. Tout d’abord, Jacqueline n’a qu’un client, dont les goûts masochistes peinent à être satisfaits malgré la bonne volonté de la vieille dame, qui s’acharne à réciter un mauvais texte libidineux, affublée pour la circonstance d’un joli fouet ainsi que d’une très seyante tenue en cuir. Quant à Philippe, c’est plutôt Jacqueline qui le soutient, lui offrant le gîte et subvenant à ses besoins comme une mère le ferait pour son fils vieux garçon et incapable (son commerce est une catastrophe financière). Autour de ce drôle de binôme évoluent d’autres figures tout aussi atypiques, dont se distingue Jean, employé de Philippe et magicien à la retraite rêvant de sa (minuscule) gloire d’antan.

Avec de tels personnages, beaucoup de cinéastes n’auraient pas hésité à se complaire dans la moquerie facile, le regard bien au-dessus de l’univers filmé. Tout le contraire de la démarche de Philippe Pollet-Villard et Marc Adjadj, deux joyeux drilles préférant s’amuser en compagnie de leurs créatures que contre elles. D’où l’impression de générosité qui émane de leur film, né d’un désir commun (Pollet-Villard et Jacqueline Heslo se sont rencontrés dans un cours de théâtre) et fabriqué semble-t-il dans l’harmonie festive. Intelligent et frais, Jacqueline dans ma vitrine séduit avant tout par son humour décalé, notamment lors de sa deuxième partie où notre petite troupe se retrouve dans un village paumé mais source de miracle (voir la séquence magique du bal populaire permettant à Jean de renouer avec le succès). Libéré sans jamais frôler la vulgarité et interprété à la perfection par des comédiens pour la plupart amateurs, ce premier film est une vraie bonne surprise et constitue le remède idéal à l’invasion estivale de divertissements médiocres.