Que celles et ceux qui se sont sentis agressés par les sorties consécutives de Baise-moi et de Fantasmes se rassurent, il existe encore bel et bien un cinéma pour eux. Droit au coeur appartient à cette catégorie d’ineptes lénifiants qui fleurent bon l’antiseptique. Pas de tache, pas de vagues. Aucune idée nouvelle, aucune idée corruptrice, aucune idée tout court. La présence au générique de David Duchovny peut un temps laisser croire que le monde mielleux dans lequel évoluent tous les personnages du film est un univers parallèle, une sorte de no man’s land x-filesque d’autant plus inquiétant que tous les protagonistes se comportent de la même façon, débordant de sentiments altruistes, de gentillesse et de compassion. Le spectateur abusé s’imagine donc mené habilement au seuil de l’étrange. Mais non. Il faut bien admettre la triste réalité : Droit au coeur n’est ni plus ni moins qu’un bon vieux mélo des familles. Pas du John Stahl, pas du Douglas Sirk. Non. De la guimauve crétine façon téléfilms lacrymaux des après-midi de télévision publique.

Un veuf séduisant s’éprend d’une jeune serveuse italo-irlandaise. Par enchantement, il reprend goût à la vie, redécouvre l’amour, trouve sa tambouille délectable et les croûtes qu’elle peint magnifiques. Mais ce que les deux niaiseux ignorent c’est qu’en la jolie catholique bat le cœur d’une autre, celui de la défunte épouse de son prétendant. Près de deux heures à se tourner autour, à se séparer et à se retrouver dans des circonstances plus artificielles les unes que les autres pour une simple histoire de greffe ? Impossible, se dit-on. Eh bien, Bonnie Hunt l’a fait. Sans honte, sans remords apparents non plus d’ailleurs. Les interprètes font ce qu’ils peuvent avec une embarrassante conviction : Minnie Driver est comme à l’habitude irréprochable, Carroll O’Connor, Robert Loggia et James Belushi s’en sortent honorablement. Mais à moins de s’être soi-même fait transplanter un palpitant, d’aimer les gorilles (il y en a de très touchant) ou de vouloir se venger bassement de quelqu’un en lui infligeant ce spectacle, aucune raison ne justifie le déplacement ni l’investissement du moindre franc dans la vision de ce tire-larmes boiteux et désuet.