Deux hommes perdent tout en une journée : les meubles de Raoul (Régis Laspalès) sont enlevés par des huissiers à la demande de son ancienne épouse, quant à Félix (Philippe Chevalier), il quitte sa femme Odette (Agnès Soral) après dix ans de vie commune. Ils connaissent alors la dure réalité sociale du chômage. Mais, heureusement, au café du coin, un inconnu leur propose de devenir représentants du vin le « Gai Vendangeur », en Bretagne.
Le réalisateur, Jean-Pierre Jackson, trouve ainsi une bonne excuse pour réunir les deux comiques de son film. Ils peuvent alors enchaîner leurs blagues déjà vues et revues. Son film devient le film de Chevalier et Laspalès. On se demande alors ce que deviendrait le cinéma comique, aujourd’hui, sans Les Nuls. En 1994, ils réalisent La Cité de la Peur, et voilà, la nouvelle vague de comiques français voit le jour. S’en suit le film des Inconnus, celui de Dupontel, de Courtemanche, récemment, celui d’Elie et Dieudonné. Ca n’empêche pas les sentiments, lui, est un best-of de blagues « Bouvardiennes ». Cela dit, l’écriture des dialogues est ainsi simplifiée, vu que tout est déjà fait. Et les acteurs connaissent leur rôle par cœur, alors pourquoi se fatiguer ? Jean-Pierre Jackson a signé de fait un film impersonnel.
De plus, il semblerait que Chevalier et Laspalès aient besoin d’acteurs connus à leurs côtés pour améliorer l’ensemble du film. Jackie Berroyer, Luis Rego, Sylvie Joly, Renée Le Calm (la dame découverte par Cédric Klapisch, dans Chacun cherche son chat) traversent le film. Tous les acteurs survolent leur rôle comme si personne ne croyait en Ca n’empêche pas les sentiments. Car, même Chevalier et Laspalès ont besoin d’une figure féminine (Cécile Bois) pour affirmer leur jeu. Le comique de situation se développe alors autour du personnage d’Eliane. Elle ricane sans cesse, met en valeur ses formes, elle tient le rôle type de la potiche. Mais le summum est atteint lorsque Félix écoute derrière la porte Raoul et Eliane forniquer et qu’un gros plan sur le sexe d’une petite statuette grecque semble vouloir nous suggérer la situation. Jean-Pierre Jackson pense alors peut-être que son public est aussi « bête » que ses personnages !
Les blagues de Chevalier et Laspalès sont d’une franchouillardise affligeante. Ainsi, vendant du vin dans un supermarché, Félix fait crier aux Bretons « Trois caisses, les fesses / Dix litrons, les nichons ». Toute la poésie et l’humour du film sont dévoilés ! On peut alors se demander où s’arrête le cinéma et où commence la bêtise. « L’inexorable, ça n’empêche pas les sentiments ! ».