Adaptation cinématographique d’une pièce de théâtre à succès, André le magnifique souffre des mêmes maux que les travaux portés à l’écran du couple Jaoui-Bacri, Cuisine et dépendances et Un Air de famille. En gros, rien ne vient justifier la transposition au cinéma de ces pièces, si ce n’est le désir de les rendre accessibles au plus grand nombre. On devine aisément les enjeux lucratifs d’une telle entreprise : plutôt qu’organiser de fastidieuses tournées en province qui ne toucheront qu’un public d’habitués, mieux vaut se servir de l’impact massif du cinéma et de son infinie reproductibilité.

C’est effectivement ce qu’on ne peut s’empêcher de penser devant les carences esthétiques d’André le magnifique. Comme d’habitude, le passage au cinéma représente pour les auteurs du scénario l’occasion d’intégrer la question de l’extérieur à l’histoire. Des scènes en décors naturels sont ainsi incorporées pour faire « vrai », comme si cette seule notion séparait le théâtre du cinéma. Dépourvus d’un quelconque intérêt dramaturgique, ces passages en extérieur montrent le plus souvent les trajets des personnages pour arriver au lieu clé de l’action (ici, le théâtre du village, le bar dans Un Air de famille). En tant que moments faibles de l’histoire, ceux-ci pourraient tout aussi bien disparaître en ellipse sans porter la moindre atteinte à l’histoire.

Car le véritable problème des adaptations au cinéma -outre le fait qu’aucune pensée théorique ne les régit et qu’elles ne sont la plupart du temps que simples mises en images-, c’est le temps. En ancrant la pièce dans un décor naturel qu’il faut montrer, un contexte social qu’il faut mettre en scène, André le magnifique perd le sens du rythme qui a forgé son succès au théâtre. Du coup, beaucoup préféreront sans doute l’énergie déployée par les interprètes sur scène à cette molle transposition sur pellicule. Si la trame de l’histoire n’a pas été modifiée par les réalisateurs -une troupe amateur de province fait appel à un comédien parisien pour monter une pièce qui sauverait le théâtre municipal du petit village de Vigoule-, quelques « audaces » ont été prises, comme le rajeunissement du couple Alexis-Janine (à l’origine des retraités) ou le remplacement de Denis Podalydès par Jean-Luc Porraz qui ne s’en sort pas trop mal dans le rôle du fourbe snobinard. Pour le reste, on retrouve les mêmes clichés sur l’opposition Paris-Province, professionnel-amateur, le tout prononcé « avé l’accent » du Sud-Ouest dans une ambiance que ne renierait pas papa Ducros « à quoi ça sert qui se décarcasse ! »