La tentation manichéenne est très forte dans le cas du traitement d’un thème aussi complexe et difficile que celui du terrorisme basque. Daniel Calparsoro a le mérite de ne jamais s’enfermer dans le carcan du film à thèse « à la Costa Gavras », où n’importe quel sujet de société est prétexte à un lourd plaidoyer.
Il n’est donc ici pas question d’un long topo historique sur les racines du terrorisme basque, les motivations de leurs acteurs ou encore la situation de leurs nombreuses victimes. Nous suivons, au contraire, le parcours d’une terroriste qui, pour éviter d’exécuter un homme, tire sur l’un de ses complices. S’en suivra une longue errance où elle doit à la fois échapper aux forces de l’ordre, aux affrontements internes suscités par son geste et tenter de récupérer son fils. Mais A Ciegas n’est jamais là où on l’attend, il esquive à chaque fois les pistes esquissées. Après l’action violente du début, il semble s’orienter vers le combat solitaire d’une mère pour récupérer son enfant. Mais ce n’est qu’une des nombreuses et fausses pistes de l’itinéraire de cette terroriste dissidente. Chaque ébauche de sujet participe, en réalité, à la construction d’un portrait désespéré du Pays Basque, malgré la note d’espoir de la fin.
A l’exclusion de quelques métaphores parfois trop patentes, le réalisateur réussit, avec une certaine subtilité, à nous montrer les perversions de l’utopie politique – quelqu’elle soit – lorsque celle-ci conduit à un autisme suicidaire.