Formé en 1991, du côté de Leeds en Angleterre, Hood a aligné une série de EPs, albums, singles, maxis et autres split singles à faire pâlir d’envie leurs collègues moins prolifiques, traçant paisiblement leur route au pays de la lo-fi. Ce nouveau disque au titre fleuve ne s’éloigne pas de la ligne du parti et trouvera sa place dans le casier à CDs entre un Belle & Sebastian et le dernier Mogwai. Et, à l’image des productions de ces deux groupes, il ne faut pas s’attendre au coup de foudre avec The Cycle, qui, autant se faire une raison, ne se fredonne pas sous la douche. Tout en vocaux délicats et hauts perchés et en jeux de guitare subtils, les morceaux dégagent une impression diffuse de nostalgie, qui peuvent frôler la mièvrerie si l’on ne prend pas la peine de s’y attarder.

Deux ou trois écoutes plus tard, l’adjectif « mièvre » a fait place au qualificatif « attachant ». L’univers très personnel et presque secret des frères Adams s’entrouvre alors à l’auditeur le temps de neuf chansons et trois interludes inattendus -ainsi, la plage 3 n’est constituée que de sons qui n’en finissent pas d’être interrompus et syncopés, et stoppe net avant de naître, comme s’il s’agissait de nous laisser entrevoir ce qui aurait pu se passer si… Cette mini-chanson sans titre résume un peu l’état d’esprit de Hood : ébaucher des chefs-d’œuvre plutôt que de les sur-réaliser, charmer le public en le laissant en permanence sur sa faim, ne jamais étaler ou gaspiller son talent de façon obscène. Elégance donc, que l’on retrouve sans excès de modération cependant dans les arrangements ultra-peaufinés, dans les accompagnements de cordes (Western housing concern), dans le choix de bruitages insolites (on soupçonne la présence de bols tibétains sur September brings the autumn dawn) et dans les tentatives de mélodies qui font des Adams et de leurs compères des sculpteurs d’ambiance plutôt que des musiciens à part entière. La plage numéro 9, elle aussi anonyme, symbolise l’autre aspect de la personnalité des post-rockers : l’originalité. Morceau de jazz désarticulé envahi de jeux d’échos, on ne sait pas trop s’il s’agit ou non d’un orchestre en train de s’accorder ou d’un groupe de musiciens incapables de jouer à l’unisson. Les instruments se superposent en s’emmêlant dans une dissonance classieuse, les plaintes d’une trompette répondent à la vague mélodie désabusée plaquée sur un piano. Plus de chansons de cette veine aurait permis à Hood de frôler le génie. On se contentera ici d’un album de simplement bon.