(Traduit de l’italien par Nathalie Bauer, Rivages, 99 F, 167p.)

Après Patratas*, Giuseppe Culicchia poursuit le récit des aventures de Walter. Autrement dit, l’histoire somme toute banale d’un jeune homme de 25 ans qui se décide à sortir de l’adolescence, sous le poids de la pression sociale. Lui, qui voyait dans la possession d’un emploi fixe, d’un compte bancaire et d’une voiture, des « symboles de mort », le voilà à la tête des trois en l’espace d’un an. Il travaille dans une vidéothèque qui était, à l’origine, une librairie. Conséquence d’un constat simple et implacable : « plus personne ne lit alors que tout le monde possède un home-video ». Le regard de Walter sur ce qui l’entoure et lui arrive se veut à la fois lucide et cynique. Culicchia prend un plaisir évident à relever, pour les dénoncer, tous les travers, les fantasmes et les obsessions de nos sociétés contemporaines. Au point que ce roman en devient une sorte de kaléidoscope dont les images sont plus ou moins réussies. A donner une vision par trop caricaturale des êtres et des choses, Culicchia finit par l’affadir et la rendre quelque peu insignifiante. Après tout, c’est peut-être cela qu’il a cherché.

Restent cependant l’histoire d’une ascension sociale et professionnelle involontaire et drolatique, et celle d’une errance existentielle et européenne. « Heureux qui comme Walter a pris des vacances en Botnie » aurait pu s’écrier Patrick Besson. Où comment, parti pour rejoindre la très naturelle Tatiana dans ce golfe qui sépare le nord de la Suède du sud de la Finlande, Walter a failli être recruté, en cours de route, comme mercenaire pour la Bosnie. Pour une femme et à une lettre près, son destin a basculé irrémédiablement : d’un face-à-face avec soi-même au grand drame collectif. A méditer.

Fabien Spillmann

* Rivages Poche / Bibliothèque étrangère