Sujet : huis clos dans un hôtel miteux à Los Angeles. Forces en présence : un jeune fou incarné par Jeremy Davies, une belle irréelle (Milla Jovovitch), un sosie de John Lennon, un peintre spécialiste du goudron et quelques autres paumés. Pour donner un coup de pied dans la fourmilière : l’inspecteur Skinner (Mel Gibson, plutôt bien), injecté dans le décor suite à un décès suspect. Meurtre ou suicide ? Il a tout le film pour le découvrir ! Sur ce scénario de son ami Bono, le leader de U2, Wim Wenders réalise un film qui fait flop, flop, flop…

Aucun fil d’Ariane, en effet, ne permet au spectateur de pénétrer cet univers fait de bric et de broc. L’élément externe, Skinner, observateur de ce microcosme gentiment déjanté, n’est pas un support suffisant pour retenir l’attention, malgré tous les gadgets dont il est pourtant pourvu : une opération destinée, alors qu’il était enfant à lui ôter un « troisième bras » en plein milieu du dos, le contraint à porter en permanence un corset ultra-rigide. Son appareillage corporel est complété d’une oreillette reliée en permanence à son téléphone portable et pour finir, cet homme-machine sème des micros dans chacune des pièces de l’hôtel de façon à capter tout ce qui s’y passe depuis son bureau-salle de surveillance. Lui-même est alors le lieu physique au sein duquel tous les habitants sont virtuellement réunis. De même, les « trucs et astuces » disséminés tout au long du scénario, effets stylistiques lourdingues -ralenti, travelling à répétition- ou références à des thématiques propres à Wenders -les nouvelles technologies de vision et d’écoute (Jusqu’au bout du monde ou The End of violence), la mise en doute de la réalité de l’existence (Les Ailes du désir)- ne parviennent jamais à constituer un bloc cohérent et attractif.

Quant au personnage d’Héloïse (Milla Jovovitch en beauté fragile -comprenez complètement à l’ouest, une sorte de Jeanne d’Arc contemporaine sans véritable mission autre que celle de se balader pieds nus dans le fameux Million Dollar Hotel), censée incarner tout le mystère du film parce qu’elle n’est pas sûre, elle-même, d’exister, il n’offre qu’une personnalité pâle et sans aspérités. Elle traverse ainsi le film en ange déchu déambulant lentement d’un lieu à un autre. Le problème étant que l’on n’a, à aucun moment, vraiment envie de savoir où elle va… et ça vaut pour le film, aussi !