Le nouveau film de Zanussi est d’actualité car sa sortie correspond, à quelques mois près, à celle de L’Eternité et un jour (T. Angelopoulos), à La Vie est belle (R. Benigni) et à Central do Brazil (W. Salles) où il est également question du thème de l’enfance qui, sensibilisant de coutume le spectateur devant le drame de la guerre, est utilisé ici à sa juste valeur puisqu’il s’agit de la propre enfance du réalisateur dans la Pologne des années 50 sous Staline. Hubert, jeune garçon âgé de 10 ans, vit seul avec sa mère depuis la fin de la guerre car son père est resté à l’Ouest et ne semble pas vouloir revenir auprès d’eux pour subir le régime stalinien. Ce qui incite la police secrète à faire cesser l’éducation d’Hubert que sa mère enverra aussitôt chez une tante, Idalia, dynamique, excentrique, « folle » et passionnée de chevaux, passant son temps à mentir…
Le choc du stalinisme a permis à de nombreux cinéastes de traiter de leur enfance mais aussi des apparences trompeuses d’une politique qui changeait constamment de visages, bafouant les idéaux individuels. Soleil trompeur de Nikita Mikhalkov représentait bien cette idée et su manipuler le spectateur comme le stalinisme l’individu.
Il n’y a pas de vérité dévoilée ultérieurement, « il y a plusieurs vérités » comme le dit si bien la tante qui se cache non sans peine sous sa double personnalité, ainsi elle peut affronter ses sentiments, l’histoire et permet au réalisateur de livrer au stalinisme sa revanche derrière cet éloge de la folie. La passion de la tante pour les chevaux renforce sa lutte contre l’oppression puisque l’équitation fut à cette époque un symbole réactionnaire. Être à cheval au galop symbolise derrière une passion pour l’animal le désir d’avancer le temps pour mieux supporter le poids du stalinisme. Cela rappelle le magnifique symbole de l’homme noir américain qui court dans le film Sweet Sweetback’s Baadasssss Song de Melvin van Peebles pour affronter et éviter l’oppression américaine et atteindre enfin sa liberté. D’ailleurs, Zanussi avoue : « à l’époque de mon enfance, l’histoire galopait et nous essayions de lui échapper sur le dos de nos destriers ».