The The, un vrai groupe ? La réponse ne fait pas l’ombre d’un doute à la sortie du New Morning : oui, plus que jamais. Bien sûr, Matt Johnson en est le leader, songwriter, chanteur et unique membre permanent depuis près de vingt ans déjà. Il n’empêche : ce qu’on vient de voir là n’a rien à voir avec la prestation d’un chanteur accompagné d’un backing-band aux ordres. Et cette toute nouvelle incarnation de The The -le quatuor n’en est qu’à son troisième concert- semble bien partie pour s’affirmer comme la meilleure de son histoire.

La plus cohérente aussi, ce qui peut surprendre, au vu du pedigree éclectique de ses membres : le très efficace guitariste Eric Schermerhorn s’est illustré auprès d’Iggy Pop, le sobre et joufflu bassiste Spencer Campbell sévissait derrière Kenny Rogers, institution country variétoche, alors que Earl Harvin, batteur black à dreadlocks impressionnant de force et de subtilité, exerçait ses multiples talents (il intervient aussi à l’harmonium et au melodica) chez MC 900 Ft Jesus. Pourtant, force est de constater que l’entente entre les musiciens relève de la télépathie. Il en résulte un son organique et plein, électrique et noisy quand les diatribes anti-mondialisation (GlobalEyes) ou anti-religion (Armageddon days are here again) de Matt Johnson l’exigent, plus sophistiqué et acoustique lorsque le chanteur au crâne rasé explore les relations intimes, comme dans Soulcatcher ou The whisperers. Extraits de Naked self, nouvel album superbe, et classiques comme This is the day et The beat(en) generation s’entremêlent tout naturellement, pour distiller sensations fortes et vraies émotions. 75 minutes de grâce aussi satisfaisantes pour le corps que pour l’intelligence, qui s’achèvent tout en dépouillement au quatrième rappel sur une reprise belle à pleurer de Weary blues from waiting de Hank Williams.