De trophées sportifs en distinctions cinématographiques, il est de bon ton aujourd’hui de récompenser, de gratifier, de remercier. Une époque de politesses ! Au milieu de ces excellences hétéroclites, cela devient difficile de faire la part du mérite ordinaire. Pourtant, il est des prix qui trouvent leur sens, quand ils récompensent le savoir-faire, l’art et la manière. Il en est ainsi du Prix Européen des Métiers d’Art et de la Création contemporaine qui étrenne cette année sa première édition et dont les œuvres sont exposées au musée des Arts décoratifs jusqu’au 20 juin.

L’époque où l’on considérait le métier d’art comme une antichambre de la production industrielle est révolue : l’artisanat d’art a bel et bien conquis ses lettres de noblesse, comme en témoigne l’initiative du Premier Prix Européen de la création. Le concours, d’inspiration française, récompense un artisan-créateur, qu’il soit issu d’une formation en école d’art ou d’arts appliqués, des filières techniques, ou qu’il soit simplement autodidacte. Une matière première, naturelle ou synthétique, à laquelle l’artiste impose la forme et l’outil, et le travail de la matière s’incarne en sept coupelles d’argent chez David Huycke (photo ci-contre), récompensé par un Premier Prix ; en colliers d’acier et d’éponge, selon la suédoise Ulrika Swärd, de cailloux, d’après le français Gilles Jonemann, ou encore dans les architectures en verre fondé, scié, concassé de Paula Bartron : des artistes qui réalisent ici l’idéal mariage entre le savoir traditionnel et les techniques contemporaines. Une trentaine de créateurs, représentant dix pays européens, ont soumis en trois à cinq œuvres récentes leur travail à un jury international. Parmi les dix artistes retenus, six lauréats répartis en deux catégories égales -les moins de 35 ans et les plus de 35 ans- ont été distingués. Le musée des Arts décoratifs expose ces pièces uniques, objets rares par la beauté et précieux par la façon. L’exposition est magnifique, le « bibelot » remarquable ; on en sort comme rasséréné, rassuré quant aux ressources d’imagination de ceux qui créent -encore- aujourd’hui.