Depuis leur arrivée, il y a trois saisons de cela, à Chadswick, ville de banlieue huppée typique, peu de choses ont changé pour George Altman et sa fille Tessa. Alors que chaque saison s’achevait sur des prémices de redistribution des cartes, la saison suivante passait la majeure partie de son temps à tout remettre à plat de façon plus ou moins balourde. Ca faisait un peu petit bras pour cette satire se voulant piquante de l’Amérique WASP et du mode de vie qui va avec à la sauce Lolita Malgré Moi. Cette troisième et dernière saison ne déroge pas à la règle.

Alors que certaines séries, comme Parks & Recreations avouent qu’elles ont fait le tour de leur sujet et offrent un reboot status quo après six saisons, Suburgatory s’y refuse. Malgré des restrictions budgétaires imposant un resserrement du cast (devenu un défilé de caricatures plus ou moins inspirées et souvent redondantes) et alors que la troisième saison promettait de traiter des retrouvailles de Tessa avec sa mère, la série n’en fait rien et se contente de revenir à la normale dès son season premiere. Dès lors, Suburgatory en profite pour en remettre une couche sur des intrigues et des schémas narratifs vus et revus (George rencontre une nouvelle femme in fine pas assez bien pour lui, Tessa visite des universités avant de ne plus jamais en reparler comme si le refus d’évoluer de la série touchait aussi ses personnages, etc.) faisant montre des limites de la série.

Plus fort encore, la plupart des personnages évincés de la série pour en recentrer sa narration ont tout de même fini par y revenir, achevant de resservir les mêmes intrigues (le voisin soumis aux désiderata de sa femme depuis le début de la série, l’ennemie jurée de Tessa toujours aussi inconsciente des réalités, etc.) et les mêmes problématiques tout en surlignant cette impossibilité d’évoluer. La série qui se moquait gentiment de l’immobilisme, du manque d’audace et du conformisme a fini par devenir tout cela tout en gardant une certaine efficacité dans l’exécution et l’usage de références venues d’ailleurs. C’est malheureusement aussi la limite d’Emily Kapnek, dialoguiste de haut vol et showrunneuse devenue le chantre d’un certain anticonformisme de network avec cette série incapable d’aborder son sujet plus profondément et de façon plus offensive ailleurs qu’en surface. Une série qui n’a pas su s’imposer ce qu’elle fustigeait chez les autres.

Malgré ses choix peu inspirés en matière de récit, cette saison est sauvée par la storyline du mariage entre Lisa et Malik auquel les parents du jeune homme sont opposés. C’est l’une des rares occasions dont la série profite pour enfin réunir tous ses personnages et les laisser interagir ensemble, nous rappelant pourquoi nous nous sommes attachés à cette folie ambiante. Quand, cerise sur le gâteau, la marche nuptiale est remplacée par du Rich Homie Quan tonitruant, on retrouve Suburgatory en grande forme. Malheureusement, le retour en grâce est de courte durée puisque l’épisode suivant est le season finale faisant office de series finale.

Une fin étrange et belle à la fois étant donné les circonstances. Alors que toutes les saisons se terminaient sur ces fausses révolutions dans le status quo initial, celle-ci s’achève sur un moment de flottement montrant Tessa se jeter dans les bras de son ex, Ryan, pour un échange de baisers épique qui durera le temps qu’il durera (la copine actuelle de Ryan étant dans les parages) mais laissant les personnages chéris de la créatrice de la série dans une sorte de stase de bonheur… Un point final aussi décevant que réjouissant pour une série qui s’était jusque là refusée à ce genre de choses décadrées.