Dix ans après le chef-d’oeuvre Battlestar Galactica, la SF tente de reprendre du poil de la bête sur le petit écran. Après Helix, nouveauté moyennement convaincante signée Ronald D. Moore (papa du terrassant BSG) lancée au printemps, la chaîne CBS donne sa chance cet été à Extant. La mention «produit par Steven Spielberg» avait plutôt tendance à nous effrayer, le cinéaste ayant souvent eu du mal à proposer à la télé des oeuvres à la hauteur de ses films. Cette fois, miracle : Extant tient davantage de A.I. que des précédentes productions télé bas du front estampillées « Spielby », telles que Falling Skies ou l’effarant Terra Nova. Créée par Mickey Fisher, la série raconte dans un futur proche le retour mouvementé de l’astronaute Molly Woods. Après un an passé dans l’espace, elle tente de reprendre une vie normale aux côtés de son mari, John, un scientifique renommé, et de son fils Ethan, premier robot humanoïde (un «Humanich») destiné à vivre comme un homme. Mais pendant sa mission spatiale, Molly a eu une absence de plusieurs heures. Quelque chose ne tourne pas rond. Elle apprend rapidement une nouvelle impossible, et commence à avoir des hallucinations.

Le pitch de Extant (à traduire par «qui existe encore») mélange avec un opportunisme certain l’inspiration «Alien» aux séries avec robots humanisés (BSG, Real Humans), sans oublier l’option «virus» très tendance ces derniers temps (The Strain, The Walking Dead). Contre toutes attentes, ce gloubi-boulga d’influences SF fonctionne plutôt bien dans le pilote, intrigant à souhait, et incarné par une Halle Berry en forme. La série bénéficie d’un univers formellement très soigné. Les flashbacks dans la station spatiale sont du niveau du Solaris de Soderbergh, dont Extant se rapproche aussi par certains de ses thèmes, comme la mort d’êtres chers. Le futur proche dans lequel se déroule la série, tout aussi soigneusement élaboré, rappelle pour le coup Minority Report ou A.I. Réaliste, il prend vie grâce à de petites touches d’anticipation : la présence de jeux pour enfants high tech et de voitures aux lignes épurées, ou encore l’omniprésence des systèmes de monitoring pour s’assurer de sa bonne santé. Une séquence se déroule dans un musée qui propose aux visiteurs une projection 3D impressionnante d’animaux disparus. Tous ces petits détails s’intègrent dans un mode de vie similaire au nôtre.

Sur la forme, Extant a donc tout bon. Sur le fond en revanche, la série hésite entre réflexion métaphysique et divertissement un poil formaté, avec complot gouvernemental et petits hommes verts (ou du moins virus alien) à la clé. Halle Berry et Goran Visnjic sont très convaincants dans les deux rôles principaux, tout comme leur enfant humanoïde interprété par le jeune Pierce Gagnon (Looper, The Crazies), mi-flippant, mi-trognon. Mais ils n’empêchent pas l’arche narrative de tourner rapidement en rond. A tel point que l’on en vient à se demander si les scénaristes de Extant savent où il veulent aller avec leur ovni. Les personnages s’impatientent, et le téléspectateur aussi. Au fil des épisodes, quelques facilités scénaristiques et incohérences apparaissent, endommageant la qualité d’une série qui s’oriente davantage vers un bon divertissement SF que l’oeuvre mémorable présagée par son pilote en apesanteur. Les Cylons de Battlestar Galactica peuvent reposer en paix. Ceux qui les rendront obsolètes ne sont pas encore arrivés sur Terre.