Le dernier épisode de la première saison de Halt And Catch Fire avait tout d’un point final. Armés des meilleures intentions du monde, nos héros s’étaient échinés à bâtir le Giant, un ordinateur qu’ils pensaient révolutionnaire mais qui ne serait au final qu’une détail de l’histoire informatique. Pendant ce temps, Apple et Microsoft créaient déjà le futur. Déçus de l’expérience, Cameron, le génie anar de la bande, lance sa propre boîte (Mutiny) et embauche Donna, la femme de Gordon. Ce dernier s’est mué d’ingénieur malheureux en exécutif malheureux de la boîte tandis que Joe, mystérieux héros de la première saison, s’évanouissait dans la nature après avoir incendié un camion plein de Giants… La course au progrès s’était jouée d’eux et sans eux et tout aurait pu s’arrêter là mais AMC a reconduit la série pour une seconde saison.

Le propos de la série est toujours aussi affûté. Après l’échec raconté par la première saison, HACF s’attache dans cette seconde livraison à détailler ce qu’il se passe après. Être fataliste et ne pas avancer de peur de se louper de nouveau ou se relever, aller de l’avant et tenter encore et encore de faire avancer les choses, proposer quelque chose et enfin goûter à la douceur du succès ? En cela, la série continue de dresser le portrait de beaux personnages, animés d’intentions plus ou moins louables et dont les égos se heurtent aux réalités de leur domaine, du marché et de la vie tout en étant hantés par cette hantise que le futur s’écrive sans eux. Au gré de détails ironiques comme une couverture de magazine parlant de l’échec total d’un Steve Jobs, la série prend le soin de minimiser son discours souvent sombre et nous rappelle que la roue peut tourner à tout moment, et le combat quotidien des personnages cherchant à innover illustre bien cette lutte pour la postérité.

Pour le reste, les choses sont plus problématiques et les bugs de la première saison reviennent même après le reboot et les patches appliqués à cette nouvelle version. Déjà consciente de la relative froideur de son sujet de base et de son inclination à tomber dans le mélo classique (mais maîtrisé et réussi) lors de la la première saison, la série semble se laisser aller cette année à beaucoup plus de facilités à ce niveau là : coucheries, divorce, relations amoureuses conflictuelles à l’excès et même une maladie neurologique incurable, rien n’est épargné. Cette profusion de clichés dans une série parlant d’innovation est gênant, mais la série se rattrape lorsque la course vers le futur entre en collision frontale avec les froides et dures réalités du présent.

Le défaut de cette qualité est que la série devient une sorte de Forrest Gump informatique lorsqu’elle dépeint son quatuor de personnages principaux comme les pionniers de ce Far West binaire dans lequel ils auraient découvert tout un pan de la culture vidéoludique, les réseaux sociaux, le chat de Caramail, l’Internet haut débit et même les antivirus à leurs heures perdues, faisant de Joe McMillan un John McAfee avant l’heure. Pas forcément crédible, cet aspect demeure le plus ludique d’une série qui ne stagne pas et nous promet un nouveau reboot, mises à jour incluses, en cas de renouvellement pour une troisième saison de ce Mad Men informatique. Un nouveau nouveau départ en pleine Silicon Valley pour Halt And Catch Fire ? Pourquoi pas.